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"On a été naïfs sur l'intégration": Amineh, de peshmerga à députée suédoise

"On a été naïfs sur l'intégration", constate Amineh Kakabaveh, ancienne combattante peshmerga devenue députée de gauche en Suède, où selon elle le "fondamentalisme" gagne du terrain dans les quartiers et nourrit l'extrême droite.

"On a été naïfs sur l'intégration": Amineh, de peshmerga à députée suédoise
Amineh Kakabaveh, ancienne combattante peshmerga kurde iranienne devenue députée de gauche en Suède, à Stockholm le 28 mars 2017 - Noella JOHANSSON [TT NEWS AGENCY/AFP/Archives]

Sa dénonciation obstinée de "l'extrémisme religieux" et de "l'oppression des femmes liée aux codes d'honneur" dans les communautés kurdes ou arabes du pays scandinave vaut des menaces à cette quadragénaire d'origine kurde iranienne. Mais aussi de fortes inimitiés au sein de sa famille politique.

D'abord écartée par la commission électorale du Parti de gauche (ex-communistes) pour se présenter de nouveau aux législatives du 9 septembre, elle a été repêchée par un vote de militants. Finalement, elle ne se retrouve pas en position éligible.

"Nous avons été naïfs, nous avons manqué de courage, nous n'avions aucun plan" en accueillant en 2015 plus de 160.000 demandeurs d'asile, dont une majorité de Syriens, alors que la Suède "connaît des problèmes d'intégration depuis 20 ans", expliquait Amineh Kakabaveh dans un entretien à l'AFP à deux jours du scrutin.

"C'est la raison pour laquelle les Démocrates de Suède, un parti raciste, risque de devenir le deuxième parti" du pays, dit-elle.

Les Démocrates de Suède (SD), parti anti-immigration fondé en 1988 par d'anciens militants néonazis, pourrait recueillir plus de 20% des voix, derrière les sociaux-démocrates du Premier ministre Stefan Löfven et au coude à coude avec les conservateurs, selon les sondages.

Or ces demandeurs d'asile ont vécu "la guerre, la dictature, la dictature islamique, ils ont connu Daech [le groupe État islamique] ou des régimes comparables" en Syrie, en Irak ou en Afghanistan, s'inquiète-t-elle.

La Suède est "de plus en plus divisée", poursuit la députée aux cheveux de jais, talons hauts et robe rouge au-dessus des genoux. "Toute rouge, je suis socialiste", lance-t-elle dans un éclat de rire.

"La société multiculturelle a été mal construite pendant plus de deux décennies, ce qui a entraîné une séparation des communautés" et le débat est tellement envenimé qu'il en est devenu tabou.

"SD a investi l'espace public alors qu'il a des intentions qui n'ont rien à voir avec la volonté d'aider les plus vulnérables. Maintenant ce sont des héros parce que les autres n'osent pas relever le défi", se désole Amineh Kakabaveh.

Kalachnikov à l'épaule

Menacée "par les racistes et les fondamentalistes", elle se dit aujourd'hui sous la protection de la Säpo, l'agence de renseignement intérieur et de contre-terrorisme.

La monarchie parlementaire qui se pique d'être une "superpuissance humanitaire" et un modèle de tolérance reste, d'après cette parlementaire désenchantée, "un pays d'opportunités".

"Je suis arrivée ici analphabète, six ans plus tard j'étais à l'université et cela fait dix ans maintenant que je suis députée", résume-t-elle.

Combattante peshmerga en Iran, elle y risquait la peine de mort, et est arrivée en Suède en 1992 avec le statut de réfugiée.

Sur la photo de couverture de son autobiographie publiée en 2016, Amineh Kakabaveh, aux traits juvéniles, porte la tenue des peshmergas, kalachnikov à l'épaule, pistolet à la hanche, une cartouchière en cuir à la taille.

À Stockholm, elle a décroché des diplômes en travail social et philosophie, et fondé en 2005 la branche suédoise de "Ni putes ni soumises", association née en France au début des années 2000 pour dénoncer le sexisme et les violences faites aux femmes.

L'émancipation des femmes, le combat d'une vie. Elle milite notamment pour l'interdiction du voile pour les jeunes filles mineures. Les écoles, échaudées par l'hostilité qu'elle suscite, n'osent pas toujours l'inviter.

L'interdiction des écoles confessionnelles fait aussi partie de son programme.

Que fera-t-elle si elle n'est pas réélue?

"Autre chose", répond-elle. "Peut-être du travail social auprès des femmes opprimées dans un autre pays, sur un autre continent".

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