Pour rien au monde ils ne rateraient les commémorations liées au Débarquement en Normandie. Chaque année, des centaines de reconstituteurs investissent les sites clés de ce moment d'histoire, habillés comme à l'époque, au volant de véhicules célèbres. Pour les touristes, c'est un véritable plongeon dans l'ambiance D-Day. Pour les locaux, c'est l'occasion de célébrer la liberté retrouvée.
Le 14 juillet en France, le 6 juin chez nous
Fabrice Baty, habitant de la Vendée, est l'un d'eux. Il se souvient avoir été profondément marqué lors de sa première fois. "Il y a ce côté convivial, mais respectueux et bienveillant", glisse celui qui fait le trajet tous les ans, avec des amis et sa famille. "Chaque année c'est différent. D'ailleurs, je préfère les D-Day hors anniversaire. L'an passé, il y avait trop de monde." Dans la famille de Benoît Leger, dans le Cotentin, le D-Day, ça se prépare toute l'année. "C'est un peu comme si la vie normale s'arrêtait pendant une semaine. En France on célèbre le 14 juillet, en Normandie, c'est le 6 juin. J'ai pris une semaine de congé."
Mais pourquoi alors ce besoin de s'habiller en tenue d'époque ? "Je me vois mal arriver en costume cravate, plaisante Philippe Massé. On est là pour rappeler ce qu'il s'est passé le 6 juin, entretenir la mémoire, et montrer le matériel, notamment aux jeunes", justifie-t-il. Il défilera à nouveau cette année à bord de sa Jeep. Pour certains, ce devoir de mémoire est d'ailleurs hérité des liens du sang. Le grand-père de Fabrice Baty avait été fait prisonnier des Allemands à Dunkerque, puis s'était échappé pour ensuite devenir agriculteur le jour et résistant la nuit. "C'est ma mère qui m'en a plus parlé. Il n'en discutait pas trop." L'oncle de Philippe Azouz, autre reconstituteur, est lui à l'origine du premier musée de Ouistreham, tandis que son père, cinq ans captif en Allemagne, était revenu les valises pleines d'objets.
"Le D-Day devient business"
Pour entretenir cette passion, les reconstituteurs doivent être à l'affût. "Avant c'était facile, on trouvait des objets en jouant dans les maisons bombardées", sourit le collectionneur. Boutiques, bourses militaria, bouche-à-oreille, achats en ligne… Les bonnes affaires sont de plus en plus dures à réaliser. "Je passe énormément de temps à regarder ce que je vais acheter", promet Philippe Massé. "On fait des fripes, on évacue des maisons, ou alors des anciens nous offrent des choses, car ils savent qu'on va les garder", évoque Benoît Leger. Le jeune homme de 23 ans l'assure, "le D-Day devient de plus en plus business". D'après tous nos passionnés, l'inflation est plus que réelle sur l'économie de la reconstitution.
"Si on prend les prix au moment du 70e D-Day, en 2014, on a depuis fait x10", constate l'heureux propriétaire d'un Dodge. "C'est affolant maintenant, regrette Philippe Azouz. Avec les films, la télévision, Internet… Beaucoup de jeunes se passionnent pour le sujet." Et alors la demande devient plus forte que l'offre. Tout heureux d'avoir acheté sa Jeep avant que les prix ne s'emballent, Philippe Massé constate, amer, que "pour certains, c'est un placement financier".
Alors que les témoins de l'époque s'éteignent un à un, il est bon de savoir que la mémoire de ces héros vit toujours grâce à ces passionnés, heureux de les remercier chaque année, tout en partageant de bons moments conviviaux.
Le site Hillman organise un camp pour la 25e fois : "C'est convivial"
C'est à Colleville-Montgomery, près de Caen, que des centaines de reconstituteurs élisent domicile.
Ils ont déjà investi les lieux. Jusqu'au lundi 9 juin inclus, des dizaines de passionnés dorment dans des tentes et mangent dans des gamelles à Colleville-Montgomery, au site Hillman. Pour la 25e année, un camp de reconstitution s'y installe, avec 50 véhicules, 75 tentes et 130 passionnés. "Ici, on ne représente que les Alliés, et majoritairement les Britanniques", explique Georges Congost, guide et bénévole de l'association les Amis du Suffolk Regiment. L'an passé, 10 000 curieux s'y sont rendus. Philippe Azouz sera là, avec fusils, tentes, jerricans, caisses à munitions… "C'est convivial, il y a des gens qui viennent de partout, même des Anglais, qui sont devenus des amis avec le temps."
Sur place, des guides sont présents en permanence pour renseigner les visiteurs sur l'histoire du lieu. "Il est possible de venir quand on veut." A ne pas manquer, dimanche 8 juin, la parade qui rassemblera 90 véhicules, sur le littoral, jusqu'au château de Fontaine-Henry, où se trouve un autre camp de reconstitution.
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