"Nous sommes arrivés à un accord crucial", avec un "bon équilibre" répondant aux "aspirations d'une PAC plus verte, plus juste et simplifiée", a déclaré la ministre allemande de l'Agriculture Julia Klöckner (CDU), à l'issue d'une réunion de deux jours au Luxembourg.
Tel n'est pas l'avis d'ONG environnementales qui le jugent nettement insuffisant.
Les orientations adoptées par les Etats membres feront désormais l'objet de discussions avec le Parlement européen, qui vote cette semaine ses propres propositions.
Ils devront trancher d'ici début 2021 sur les règles qui s'appliqueront à partir de 2023. Le commissaire européen à l'Agriculture, Janusz Wojciechowski, a qualifié l'accord des ministres de "bon point de départ" pour ces négociations.
Avec un budget déjà fixé d'environ 387 milliards d'euros pour sept ans, la PAC est le premier poste budgétaire de l'UE.
Selon l'accord des Vingt-Sept, tous les agriculteurs devraient être tenus de respecter des normes environnementales beaucoup plus strictes pour recevoir des aides financières européennes.
Les petites exploitations seraient soumises à des contrôles simplifiés, "ce qui réduirait la charge administrative, tout en garantissant leur contribution aux objectifs environnementaux et climatiques".
"Phase d'apprentissage"
Surtout, les "écorégimes", un système de primes versées aux agriculteurs pour soutenir leur participation à des programmes environnementaux plus exigeants, deviendraient obligatoires: chaque Etat devra y consacrer au moins 20 % des paiements directs de l'UE.
L'objectif étant que les exploitations reçoivent des fonds supplémentaires si elles vont au-delà des normes de base en matière d'environnement.
Ce point a fait l'objet de frictions importantes, nombre de pays de l'Est redoutant de perdre des fonds européens si un nombre insuffisant d'agriculteurs participent aux programmes environnementaux. Pour les convaincre, une "phase d'apprentissage" de deux ans est prévue.
"Nous voulons certes que nos agriculteurs soient compétitifs à travers l'UE et à l'exportation, mais avant tout nous voulons un standard (environnemental) européen qui ne soit pas basé sur le plus faible dénominateur commun", a souligné Julia Klöckner.
Plusieurs Etats, dont la France, se battaient pour que soient imposées des normes harmonisées afin de ne pas créer de distorsion de concurrence entre pays.
Les programmes environnementaux concernés par les écorégimes "incluent des pratiques comme l'agriculture de haute précision, l'agro-foresterie, l'agriculture biologique, mais les Etats seront libres de désigner leurs propres instruments en fonction de leurs besoins", précise le Conseil des ministres dans un communiqué.
- "En jachère" -
Dans le même temps, les eurodéputés ont adopté tard mardi plusieurs amendements clés sur la PAC, fruit d'un compromis entre les trois grands partis au Parlement européen (PPE, droite ; Renew, libéraux ; S&D, sociaux-démocrates).
Ce compromis propose notamment de consacrer aux écorégimes "au moins" 30% des aides directes aux agriculteurs, ou encore de gonfler l'enveloppe prévue pour un soutien supplémentaire aux exploitations de petites surfaces. Le vote final sur la PAC au Parlement interviendra vendredi.
Les accords auxquels sont parvenus les ministres de l'Agriculture comme les eurodéputés ont été vivement dénoncés par des ONG, qui les jugent incompatibles avec les engagements pris par l'UE.
L'architecture de la nouvelle PAC a été élaborée en 2018, avant les stratégies du Pacte vert et "De la ferme à l'assiette", présentées par Bruxelles au printemps 2020.
Celles-visent notamment à réduire de 50% l'usage de pesticides d'ici 2030 tout en réservant un quart des terres aux cultures biologiques.
"C'est un jour sombre pour l'environnement (...) La transition vers une agriculture écologique est désormais en jachère", a réagi Bérénice Dupeux, de l'European Environmental Bureau, dénonçant l'adoption d'"objectifs économiques contradictoires" et le seuil trop bas réservé aux écorégimes.
"Avec cette PAC désastreuse, nous nous retrouvons avec un texte du monde d'avant", s'indignait récemment l'eurodéputé Vert Benoît Biteau, taxant le contenu des écorégimes de "grand flou".
La réforme agricole, initialement prévue pour 2021, fait l'objet d'une phase de transition de deux ans jusqu'à janvier 2023, pendant laquelle les fonds du nouveau budget sont alloués selon les anciennes règles.
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