Depuis vendredi, les Pays-Bas et leurs alliés "frugaux" résistent aux appels de l'Allemagne et de la France, les deux poids lourds de l'Union, à accepter un plan qui bénéficieraient aux pays les plus touchés par la pandémie, l'Espagne et l'Italie en tête.
Sur la table des négociations, un fonds constitué par une capacité d'emprunt de 750 milliards d'euros pour relancer l'économie européenne mise à terre par la pandémie, adossé au budget à long terme de l'UE (2021-2027) de 1.074 milliards d'euros. L'unanimité des 27 Etats membres étant requise, un compromis est particulièrement difficile.
La chancelière allemande Angela Merkel, dont le pays assure la présidence de l'Union depuis le 1er juillet, et le président français Emmanuel Macron n'ont pas ménagé leurs efforts pour l'adoption de ce plan, rendu d'autant plus urgent que l'Europe est menacée d'une récession historique.
"Les consultations sont à une étape importante", a déclaré un membre de la délégation allemande. "On ne peut pas encore dire s'il y aura une solution demain, mais cela vaut la peine de continuer à travailler", a ajouté la source.
Après un dîner samedi, le président du Conseil, chef d'orchestre du sommet, Charles Michel a réuni le président français, la chancelière allemande, les dirigeants des quatre "frugaux" (Pays-Bas, Autriche, Danemark et Suède) auxquels s'est joint celui de la Finlande.
"Cette réunion a été très dure", ont indiqué à l'AFP deux sources européennes. Après plusieurs tentatives de compromis, Mme Merkel et M. Macron ont quitté la réunion pour un entretien dans leur hôtel avec le dirigeant italien Giuseppe Conte, selon une source diplomatique.
Ils attendaient un pas des "frugaux" en leur direction qui n'est pas venu: devant des journalistes, le Premier ministre néerlandais Mark Rutte a déclaré "ne pas avoir entendu d'ultimatum".
Nouveau compromis
La chancelière et le président français retrouveront Charles Michel à 09H30 locales pour décider de la marche à suivre, a-t-on indiqué de source diplomatique
Samedi, M. Michel avait fait une proposition révisée pour tenter de lever les réserves des Pays-Bas et de leurs alliés sur le plan de relance. Il devrait en faire une nouvelle dimanche, après les entretiens menés dans la nuit.
En fin de journée samedi, une des options sur la table était de modifier la répartition entre prêts et subventions en augmentant la part des premiers à 300 milliards (contre 250 dans la proposition initiale) sans réduire la part des subventions directement destinées aux Etats pour soutenir leurs plans de relance.
Les "frugaux" préfèrent nettement les prêts aux subventions. Mais Paris et Berlin ont signifié leur refus de baisser les subventions sous le montant de 400 milliards.
Pour tenter de convaincre Mark Rutte, Charles Michel a par ailleurs proposé un mécanisme permettant à un pays qui aurait des réserves sur le plan des réformes présenté par un autre Etat pour obtenir des aides, d'ouvrir "dans les trois jours" un débat à 27, soit devant le Conseil européen (c'est-à-dire les dirigeants), soit devant les ministres des Finances de l'UE.
Une réponse au souhait de M. Rutte de voir ces plans nationaux validés par les 27 à l'unanimité, ce qui offrirait de facto un veto à n'importe quelle capitale.
Les pays "frugaux" reprochent en effet à leurs voisins du Sud un certain laxisme budgétaire et le manque de compétitivité de leur économie. Mais ces demandes pressantes de réformes inquiètent l'Italie et l'Espagne, qui craignent d'être soumis à un programme de réformes (marché du travail, retraites...) imposé, comme à la Grèce par le passé.
Autre coup de pouce de Charles Michel pour vaincre les résistances des frugaux: il propose d'accroître certains "rabais" accordés aux pays qui versent davantage d'argent au budget de l'UE qu'ils n'en reçoivent.
Ce serait le cas pour Vienne, Copenhague et Stockholm --mais pas La Haye ni Berlin dont les rabais restent inchangés.
Outre ces sujets délicats, d'autres promettent encore de peser sur les discussions, en particulier la question de lier le versement des aides européennes au respect de l'Etat de droit, qui hérisse Budapest et Varsovie.
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