Dans leur ordonnance datée du 10 juillet, dont l'AFP a eu connaissance, les deux magistrates ont demandé le renvoi devant la cour d'assises de Paris de Yacine Mihoub, 30 ans, et Alex Carrimbacus, 24 ans, pour "meurtre sur personne vulnérable et commis en raison de la religion de la victime", "vol aggravé" et "dégradation par moyen dangereux pour les personnes", conformément aux réquisitions du parquet.
Le 23 mars 2018, le corps de Mireille Knoll, une femme de 85 ans atteinte de la maladie de Parkinson, avait été trouvé lardé de 11 coups de couteau et partiellement carbonisé dans son appartement d'une HLM, dans l'est parisien.
Les juges ont également ordonné un procès devant la même cour d'assises pour la mère de Yacine Mihoub, pour "destruction de document ou objet concernant un crime pour faire obstacle à la manifestation de la vérité". Elle est notamment soupçonnée d'avoir nettoyé le couteau ayant potentiellement servi au crime.
"Comme je l'ai toujours dit, Mme Knoll a été tuée à la fois parce que c'était une vieille personne pas en état de se défendre et parce qu'elle inspirait une détestation particulière en raison de ses origines juives", a déclaré à l'AFP Me Gilles-William Goldnadel, avocat de la famille Knoll.
Dans cette enquête, Yacine Mihoub, le fils d'une voisine qui connaissait l'octogénaire depuis l'enfance, et Alex Carrimbacus, un marginal aux antécédents psychiatriques, avaient rapidement été identifiés comme suspects. Les deux hommes s'étaient connus lors d'un séjour en prison.
Mais ils n'ont cessé, tout au long de l'instruction, de s'accuser mutuellement des coups mortels. Il y a un an, une confrontation et une reconstitution n'avaient pu permettre de faire la lumière sur les faits.
Selon Alex Carrimbacus, Yacine Mihoub lui avait dit de venir chez Mireille Knoll pour un cambriolage. Mihoub lui affirme avoir invité Carrimbacus à le rejoindre pour "passer un bon moment".
"Coaction"
Puis sur le meurtre, Carrimbacus a raconté que Mihoub, très alcoolisé, avait d'abord porté Mireille Knoll dans sa chambre, pendant que lui restait dans le salon.
Il a affirmé qu'elle l'avait ensuite appelé et que, lorsqu'il était arrivé dans la pièce, il avait vu son camarade la poignarder à plusieurs reprises, notamment à la gorge.
De son côté, Yacine Mihoub a dit qu'il avait entendu Mireille Knoll crier le nom de son acolyte et qu'il l'avait vu, de l'entrée de la chambre, porter des coups de couteau, également à la gorge.
Dans leur ordonnance, les juges ont estimé "particulièrement difficile de se fier" aux déclarations des deux hommes "tant est relevé dans la procédure leur propension respective au mensonge".
Mais "leur attitude postérieurement aux faits démontre une coaction lors de la scène de meurtre", notent-elles.
Sur le caractère antisémite du meurtre, elles rappellent qu'il était apparu quand en garde à vue, Carrimbacus avait affirmé que lors de sa discussion avec Mireille Knoll, Yacine Mihoub avait reproché aux Juifs d'"avoir des moyens financiers et une bonne situation". Ses déclarations ont ensuite varié au fil de l'instruction.
Mais pour les magistrates, une telle discussion est "plausible". "Les investigations ont permis de révéler l'ambivalence de Yacine Mihoub vis-à-vis du terrorisme islamiste qui prône notamment l'antisémitisme", écrivent-elles.
"Les juges n'ont pas su résister à la pression de l'opinion publique", ont estimé Me Charles Consigny et Me Fabrice de Korodi, les avocats de Yacine Mihoub. "Il n'y a aucun élément dans le dossier en dehors des déclarations d'Alex Carrimbacus qui donne un quelconque caractère antisémite à cette affaire", ont-ils affirmé.
Me Karim Laouafi et Me Merabi Murgulia, qui défendent l'autre jeune homme, "les éléments laissant supposer le caractère antisémite du meurtre concernent M. Mihoub et certainement pas M. Carrimbacus".
"S'il existe un mobile, il n'est certainement pas chez M. Carrimbacus qui ne connaissait pas la victime", ont-ils ajouté, estimant que la thèse de M. Mihoub ne tenait "absolument pas".
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.