Trois ans après son arrestation à Téhéran, cet homme de 66 ans, qui a subi interrogatoires et séjours à l'isolement, grève de la faim et tentative de suicide, redoute aujourd'hui le nouveau coronavirus.
"Ma crainte est que le gouvernement britannique nous ait oublié", dit dans cet enregistrement datant d'une dizaine de jours, partagé par son épouse, cet homme qui dispose de deux passeports iranien et britannique.
Anoosheh Ashoori rendait visite à sa mère dans la capitale iranienne en août 2017 quand il a été arrête, accusé d'espionnage pour Israël et condamné à 10 ans de prison, selon sa famille qui vit à Londres.
Dans le jardin de sa maison, son épouse Sherry Izadi s'en prend aux accusations "grotesques" contre son mari, condamné selon elle à l'issue d'un procès qui n'a duré qu'une heure.
Ce père de deux enfants n'a jamais pris part à une quelconque activité politique, explique-t-elle à l'AFP, "nous sommes des gens très ordinaires". "Il est parti un jour faire des courses et n'est jamais revenu."
"Ce serait inimaginable pour quelqu'un qui est innocent de rester 10 ans quelque part pour quelque chose qu'il n'a pas fait", dit son épouse.
Certains prisonniers étrangers ont pu bénéficier de permissions de sortie au début de la pandémie de coronavirus, à l'instar de la Britannico-iranienne Nazanin Zaghari-Ratcliffe.
Anoosheh Ashoori, lui, reste derrière les barreaux et sa famille trépigne face à l'absence d'avancées de la part du gouvernement britannique.
"Rien à perdre"
Mme Izadi a rencontré le ministre des Affaires étrangères Dominic Raab en octobre, mais "rien n'en est sorti", dit-elle. Le ministère leur a conseillé de ne pas parler à la presse pendant que la diplomatie était à l'oeuvre, mais M. Ashoori leur a demandé de diffuser ses déclarations, qui fait partie du journal quotidien qu'il enregistre lors des appels quotidiens avec sa femme.
"Il n'a rien à perdre", souligne sa fille Elika, âgée de 33 ans.
Londres dénombre une douzaine d'incidents où des détenteurs de passeports britanniques ont été arrêtés depuis 2015. En mai 2019, elle a conseillé à ses ressortissants aux bi-nationaux de ne pas se rendre en Iran.
L'ancien ministre des Affaires étrangères Jeremy Hunt avait accusé Téhéran en 2018 d'utiliser les détenteurs de passeports britanniques comme des "pions" dans un jeu diplomatique, ce que l'Iran dément.
Les soutiens d'Anoosheh Ashoori et de Nazanin Zaghari-Ratcliffe sont convaincus que leurs cas sont liés à une bataille judiciaire autour d'une vieille dette de 400 millions de livres sterling (450 millions d'euros) envers Téheran liée à un contrat d'armement.
La détention en Iran de bi-nationaux d'autres pays, dont l'universitaire franco-iranienne Fariba Adelkhah, a été dénoncée à maintes reprises.
Dans l'un des messages envoyés depuis sa prison, M. Ashoori raconte que l'un de ses co-détenus a vu Mme Adelkhah arriver en prison, "frappée et tirée au sol par les cheveux", agonie d'injures et de coups par la police secrète.
Le ministère des Affaires étrangères britanniques assure faire du sort des bi-nationaux une "priorité", traitée au plus haut niveau du gouvernement. "Nous appelons fermement l'Iran à permettre à M. Ashoori de retrouver sa famille", a déclaré un porte-parole à l'AFP.
L'ambassade d'Iran à Londres rejette de son côté toute motivation politique, affirmant que "M. Ashoori a été condamné pour des délits relatifs à la sécurité nationale par une juridiction iranienne" devant laquelle il "avait le droit et la possibilité de se défendre". Elle assure que les prisonniers ont accès à des services médicaux en détention aussi bien qu'à l'extérieur.
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