Portée par le député corse Michel Castellani (Libertés et territoires), la proposition de loi a été adoptée en première lecture à la quasi unanimité et doit maintenant être examinée par le Sénat.
Présent au stade il y a près de 30 ans pour cette demi-finale de Coupe de France entre Bastia et l'Olympique de Marseille, Michel Castellani a raconté dans l'hémicycle les "grincements de la tribune Nord branlante", une tribune provisoire "construite à la hâte" pour augmenter la capacité du stade.
"J'ai demandé à mon fils de descendre et de rester plus bas. Bien d'autres n'ont pas eu cette chance". Avant le coup d'envoi, vers 20H20, "le bruit terrible tel un train qui passe dans mon dos" et le drame: 18 morts et "2.357 blessés", après la chute de la partie haute de cette tribune.
Ce fut "une tragédie nationale, une des pages les plus sombres de l'histoire sportive" française, a souligné la ministre des Sports Roxana Maracineanu, qui a soutenu le texte, comme les députés de la majorité.
Depuis, le collectif des victimes et leurs familles demande l'interdiction des matches le 5 mai, mais fait face aux réticences de la Ligue et de la Fédération, gênées dans l'organisation de leurs compétitions.
Le vote de l'Assemblée est une "énorme satisfaction. C'était impensable pour les familles qu'on puisse jouer au football le jour de la plus grande catastrophe du sport français", a réagi Josépha Guidicelli, présidente du collectif. Le club de Bastia a aussi salué "28 années de combat pour arriver à ce jour historique".
"Pas insurmontable"
La proposition de loi prévoit de modifier le code du sport pour "qu'aucune rencontre ou manifestation sportive" de Ligue 1, Ligue 2, Coupe de France ou Trophée des Champions ne soit jouée le 5 mai.
"Reporter les matches ne me semble pas insurmontable", a estimé Mme Maracineanu, tout en reconnaissant que l'organisation des manifestations sportives ne relève pas du législatif, mais des instances, Fédération et Ligue de football professionnel.
En juillet 2015, le secrétaire d'Etat aux Sports Thierry Braillard avait mis en place le gel des matches pour les seuls samedis 5 mai, et organisé dans les autres cas des hommages aux victimes: minutes de silence, brassards noirs ou applaudissements.
"Si on peut déplacer les matches lorsqu'il s'agit d'un samedi, je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas possible les autres jours de la semaine", a jugé Mme Maracineanu.
Pour le football amateur, les députés ont aussi adopté des amendements en faveur de l'organisation d'une minute de silence et du port d'un brassard noir les 5 mai.
"Légiférer sur l'émotion"
Les compétitions internationales, Ligue des champions, Europa League ou rencontres en sélections, ne sont quant à elles pas concernées, car hors du champ des instances et parlementaires français.
La proposition de loi a obtenu un soutien de tous les bancs politiques avec 85 voix pour, une abstention et un vote contre de la députée LREM Anne-Christine Lang.
Tout en faisant part de sa "compassion", l'élue de Paris a jugé qu'il n'appartenait pas aux députés de "légiférer sur l'émotion" et que les commémorations ne relevaient pas du "registre législatif".
La députée MoDem Géraldine Bannier a voté la proposition de loi "par respect pour les victimes", mais s'est "interrogée sur la jurisprudence qu'elle pourrait engendrer pour d'autres événements tragiques à venir".
Tous les autres parlementaires se sont succédé à la tribune pour soutenir le texte. A plusieurs reprises, des députés ont rappelé que François Mitterrand avait dit peu après le drame "qu'aucun match ne serait joué le 5 mai".
Plusieurs élus ont critiqué les réticences des instances sportives sur le sujet, la gauche s'en prenant à la "cupidité" de la Ligue et de la Fédération.
Avant ce vote, la Ligue avait défendu une proposition "alternative" avec une "commémoration renforcée dans les stades".
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