Ils sont 11 millions pris au piège depuis jeudi, lorsque les autorités ont décidé de couper la ville du reste du monde, dans l'espoir d'enrayer l'épidémie qui a déjà tué 26 personnes, presque toutes dans la région du centre du pays.
Au sud de l'agglomération, dans un grand ensemble de tours d'une vingtaine d'étages, Wang Yanhong, 53 ans, est ravie d'accueillir une équipe de journalistes étrangers.
"Je suis très contente d'avoir des invités parce que cette année on passe le réveillon tous les deux avec mon mari", dit-elle en ouvrant sa porte à l'AFP.
Comme la plupart des habitants, cette jeune retraitée d'un supermarché n'a pas mis le nez dehors depuis des jours, effrayée par le coronavirus parti d'un marché de la ville.
Dans son petit appartement propret, elle a mis le couvert, tout simple. Les bols et les baguettes et aussi une bouteille de vin rouge local.
Personne n'en boira, rigole-t-elle, car ni elle ni son mari ne tiennent l'alcool. Mais ce soir c'est fête, et même la plus importante du calendrier.
Retrouvailles gâchées
Il va quand même falloir se forcer: à cause de la mise en quarantaine de la ville, où toutes les festivités sont annulées, leur fils, âgé de 25 ans, a dû renoncer à rendre visite à ses parents.
Un crève-coeur pour des Chinois pour qui le Nouvel an est la seule période de l'année où les familles, même les plus modestes, sont habituellement réunies.
Dans un pays où des millions de travailleurs migrants vivent parfois à des centaines de kilomètres de chez eux, les sept jours de congé du Nouvel an donnent lieu à un énorme chassé-croisé dans les transports.
Mais cette année, l'épidémie a bouleversé les transports et le fils, Andy, a dû rester sur son lieu de travail à Hangzhou, à 750 km à l'est.
"C'est la première fois qu'il ne rentre pas pour fêter le Nouvel an avec nous", soupire Mme Wang.
Elle ne s'inquiète pas trop pour lui, qui reste dans le monde normal, loin de la zone interdite où presque plus personne n'ose sortir depuis deux jours, même avec un masque sur le visage.
"Mon fils va bien, il passe le réveillon avec ses amis et ses collègues. Il m'a envoyé une vidéo de ce qu'ils vont manger (...) et on s'appellera pour se souhaiter la bonne année", se rassure-t-elle.
Fenêtres ouvertes contre le virus
L'épidémie, Mme Wang et son mari, Pen Lixin, 53 ans également, vivent avec.
"Tous les matins, je nettoie et désinfecte l'appartement et j'ouvre grand les fenêtres" malgré le froid, confie-t-elle, habillée même à l'intérieur dans un manteau à col en fourrure.
Mais à la maison, inutile de porter un masque, devenu obligatoire en ville. "Nous ne nous sommes que tous les deux", observe-t-elle.
Samedi, pour le jour de l'An, le couple n'ira pas voir les parents et amis avec qui il a l'habitude de sortir au restaurant pour l'occasion.
"Bien sûr que je regrette mais je dois surmonter ça. Pourquoi? Parce que c'est un moment de grande mobilisation pour le pays", affirme M. Pen.
Heureusement, en prévision du Nouvel an, le couple a fait des provisions bien avant le bouclage de la ville et a de quoi tenir un siège.
Pour le réveillon, M. Pen, chauffeur de son état, a préparé de savoureuses spécialités locales: poisson, boulettes de viande, galettes de lotus.
Après le dîner, le couple regardera sur son grand téléviseur le gala annuel de CCTV, la chaîne nationale. L'émission considérée comme la plus regardée du monde, avec 1,17 milliard de spectateurs l'an dernier.
Des biscuits et des noix à grignoter sont prêts sur une table basse: il va falloir tenir la distance, l'émission dure quatre heures, jusqu'à minuit.
Pas exclu que cette année, l'audience batte tous les records: affolés par l'épidémie, de très nombreux Chinois ont annulé les réjouissances prévues et passent la soirée chez eux, devant la télé.
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