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Ghosn écarté, France et Japon réaffirment leur soutien à l'Alliance Renault-Nissan

La France et le Japon ont réaffirmé jeudi leur soutien à l'Alliance Renault-Nissan, peu après que le conseil d'administration du géant de l'automobile japonais a décidé de limoger son emblématique président Carlos Ghosn, détenu à Tokyo pour des malversations présumées.

Ghosn écarté, France et Japon réaffirment leur soutien à l'Alliance Renault-Nissan
Carlos Ghosn, le président révoqué de Nissan Motors, lors d'une conférence de presse le 12 mai 2011 à Yokohama au Japon - KAZUHIRO NOGI [AFP/Archives]

Les ministres de l'économie français et japonais Bruno le Maire et Hiroshige Sekō ont réaffirmé leur soutien "à l'alliance formée entre Renault et Nissan et leur souhait partagé de maintenir cette coopération gagnante" dans un communiqué conjoint publié après une rencontre à Paris.

La direction de Nissan a elle annoncé que la coopération avec son partenaire français de longue date Renault "restait intacte", à l'issue d'une réunion extraordinaire qui a duré plus de 4 heures à Yokohama, en banlieue de la capitale japonaise.

Le conseil d'administration de Nissan, dans lequel siègent deux représentants de Renault, a jugé à l'unanimité que les soupçons pesant sur Carlos Ghosn, maître d'oeuvre du mariage franco-japonais, suffisaient pour le chasser de son poste de président.

Nissan justifie dans un communiqué cette décision radicale par "des actes graves confirmés", mentionnant "une minimisation de ses revenus durant une longue période dans les rapports financiers, une utilisation frauduleuse à des fins personnelles de fonds d'investissements et de notes de frais".

Hiroto Saikawa, patron exécutif du constructeur japonais, avait demandé publiquement cette révocation lundi, lors d'une conférence de presse entièrement à charge contre Carlos Ghosn, son ancien mentor.

Il était pressenti pour prendre la présidence par intérim du conseil d'administration, mais aucun remplaçant n'a été nommé. Le poste sera pourvu ultérieurement.

Cette révocation scelle pour Carlos Ghosn, qui à 64 ans est l'un des plus puissants capitaines d'industrie du monde, la fin de près de 20 ans passés à la tête de Nissan, la majeure partie du temps comme PDG puis à la présidence du conseil. Il risque la même sanction chez Mitsubishi Motors qui a rejoint l'alliance en 2016: un conseil d'administration se réunira lundi.

Le Franco-Libano-Brésilien reste officiellement PDG de Renault mais "temporairement empêché" comme le constatait pudiquement le constructeur français dans un communiqué mardi. Les rênes de Renault sont tenues désormais par son numéro deux, Thierry Bolloré, qui assure l'intérim.

La vie de Carlos Ghosn, qui a uni ces trois constructeurs pour en faire le numéro un mondial de l'automobile, a basculé quand son avion s'est posé lundi au Japon. Aussitôt arrêté, il est resté silencieux depuis, dans sa cellule d'un centre de détention de Tokyo.

"Faute grave"

Officiellement, M. Ghosn est pour l'heure accusé d'avoir, avec des complices, "minimisé sa rétribution à cinq reprises dans des rapports remis entre juin 2011 et juin 2015", en déclarant aux services financiers une somme totale de 4,9 milliards de yens (environ 37 millions d'euros) au lieu de près de 10 milliards de yens.

"Ce type de déclaration mensongère constitue une des fautes les plus graves au regard de la législation imposée aux entreprises cotées", a déclaré jeudi à la presse Shin Kukimoto, procureur adjoint de Tokyo.

Les révélations pleuvent dans les médias japonais sur d'autres délits dont se serait rendu coupable Carlos Ghosn, par exemple en offrant un emploi fictif à sa soeur.

Les soupçons pesant sur lui découlent d'une enquête interne conduite par Nissan au cours des derniers mois.

Mercredi, le tribunal a décidé de prolonger de 10 jours sa détention afin de poursuivre les investigations. Et cette période pourrait se prolonger bien au-delà, en vertu des règles du système judiciaire japonais.

Le groupe Nissan, en tant qu'entité morale, peut en théorie aussi faire l'objet de poursuites, a précisé le représentant du parquet.

Une fusion en discussion?

Face à cette affaire qui ébranle l'Alliance comme jamais depuis sa naissance en 1999, le gouvernement français est très rapidement monté au créneau pour rassurer sur l'avenir du constructeur au losange, dont l'État détient 15%.

Si, au Japon, la tonalité est officiellement la même, la presse locale fourmille de déclarations anonymes de responsables de Nissan affirmant que le groupe veut revoir la structure de celle-ci, "condition nécessaire pour qu'elle continue", selon l'un d'eux.

L'un des objectifs serait de modifier les rapports de force matérialisés dans les participations croisées: Renault détient 43% de Nissan, mais le Japonais, qui domine son allié en termes de chiffre d'affaires, n'en possède que 15%, une situation source de rancoeurs dans l'archipel.

Selon le quotidien économique Nikkei, qui cite un dirigeant de Nissan, Carlos Ghosn cherchait à intégrer les deux groupes, et "il était possible qu'un plan concret soit prêt au printemps prochain", un scénario de fusion ouvertement rejeté par M. Saikawa.

De tels scénarios circulent depuis un certain temps dans la presse. En mars dernier, l'agence Bloomberg avait évoqué une fusion des deux groupes.

Dans une interview à l'AFP, en février, M. Ghosn avait dit vouloir "continuer la convergence" entre les trois entités (Renault-Nissan-Mitsubishi) et déclaré, à propos des participations croisées: "Tout est sur la table. Il n'y a pas de tabou, pas d'interdit".

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