En ce moment

Au Bélarus, l'histoire oubliée des "enfants de France" rapatriés en URSS

Quand elle a embarqué dans un bateau pour l'URSS il y a 70 ans, Ianina Statchko était loin de s'imaginer qu'elle ne reverrait plus son pays natal: la France.

Au Bélarus, l'histoire oubliée des "enfants de France" rapatriés en URSS
Ianina Statchko, 88 ans, devant sa maison du village de Kodi, au Bélarus, le 11 août 2018 - Sergei GAPON [AFP]

Cette retraitée de 88 ans vivant au Bélarus fait partie de ces "enfants de France", comme les a surnommés la presse bélarusse, emmenés par leurs parents qui avaient cru aux sirènes de la propagande soviétique et répondu à la vague de rapatriement lancée par Moscou.

A leur arrivée en URSS, ils ont perdu leur nationalité d'origine, découvert le dénuement et, pour les moins chanceux, la répression politique.

"J'aurais pu bien sûr accomplir plus de choses en France qu'ici. Mais il est évidemment trop tard pour revenir. J'aimerais revenir au pays, retrouver notre maison. Et peut-être voir Paris… Je n'ai jamais été à Paris", soupire Ianina Statchko, rencontrée par l'AFP dans une ferme de l'ouest du Bélarus, près des frontières polonaise et lituanienne.

Comme de nombreuses autres, sa famille est arrivée en France en 1929, en provenance de Pologne, pour pallier le manque d'ouvriers dans les mines du Nord alors paralysées par des grèves.

"En France nous vivions bien. Nous avions une maison que mon père avait obtenue de la mine", se souvient l'octogénaire.

Arrestations dès l'arrivée

Mais son père, après la Deuxième guerre mondiale, perd son travail. Et la région bélarusse dont il est originaire est rattachée à l'URSS. Commencent alors des discussions dans le foyer, qui lit la presse soviétique et sa propagande.

A l'époque, l'URSS entreprend une grande campagne de rapatriement: prisonniers, travailleurs forcés, réfugiés de guerre soviétiques; mais aussi immigrés et exilés ayant fui après la révolution bolchévique.

En 1952, les statistiques soviétiques estimaient à 4,3 millions le nombre de rapatriés - déplacés de guerre et anciens exilés - venus principalement d'Europe continentale (Allemagne, Autriche, Roumanie, France, Pologne, Italie) mais aussi du Royaume-Uni et même des Etats-Unis.

"Mon père a finalement dit qu'il souhaitait rentrer à la maison. Mais moi, personne ne m'a demandé mon avis", raconte Ianina Statchko, qui était devenue couturière en France.

En 1948, la famille quitte Marseille pour Odessa, en Ukraine, avec 2.800 autres rapatriés.

"Nous voyagions comme des ouvriers, en troisième classe. Des personnes en première et deuxième classes emmenaient avec eux leur voiture, d'autres leurs biens, certains laissaient en France une entreprise. Il y avait des médecins, des ingénieurs, des enseignants...", énumère Ianina Statchko.

A l'arrivée, les passagers des première et deuxième classes subissent immédiatement la répression stalinienne.

"Ils les ont arrêtés et ont confisqué leurs biens", résume la vieille dame, dont la famille, privée de passeports français, est transportée dans des wagons à bestiaux au Bélarus.

Devenu employé d'un kolkhoze, son père ose un jour s'exprimer: "Lors d'une réunion de paysans, mon père a craqué et s'est mis à gronder le président (du kolkhoze). Il a pris un an de prison pour +subversion contre la collectivisation+".

"Nous avons été très effrayés et nous sommes restés silencieux. Où aurais-je pu étudier? Pendant cette période, on essayait juste de vous faire taire. J'envoyais des lettres en France mais j'ai arrêté parce que nous avions peur", poursuit Ianina Statchko.

Retrouvés par la France

Grâce à une machine à coudre française miraculeusement conservée, la famille de Ianina survit à la faim et aux maigres rations d'après-guerre. Jusque dans les années 1970, elle coud des robes à la mode française des années 1940.

En 1973, la France retrouve la trace de son père et lui verse jusqu'à sa mort, puis à sa femme, une retraite confortable pour son travail dans les mines françaises.

Mais avec la dislocation de l'URSS, la trace de ces anciens Français se perd dans les années 1990.

En janvier dernier, la presse locale bélarusse fait resurgir l'histoire de Ianina Statchko. Début juillet, elle est invitée à l'ambassade de France à Minsk avec une dizaine d'"enfants de France" et leurs descendants.

De l'ambassadeur français, l'ancienne couturière a obtenu la promesse d'un dernier voyage dans le village du nord de la France où elle a vu le jour il y a près de 90 ans.

Galerie photos

Newsletter

Restez informé ! Recevez des alertes pour être au courant de toutes les dernières actualités.
Réagir à cet article

L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.

En direct
Petites Annonces
Immobilier
viager en Ardèche
viager en Ardèche Villevocance (07690) 60 000€ Découvrir
     Location Maison Neuve Meublée ROYAN                                                                                                 m2 avec garage 20 m2 et une très grande cave environ 40 m2 (com
Location Maison Neuve Meublée ROYAN m2 avec garage 20 m2 et une très grande cave environ 40 m2 (com Royan (17200) 950€ Découvrir
Pavillon Construction 2005 dans village 5 pièces de 93 m2
Pavillon Construction 2005 dans village 5 pièces de 93 m2 Saint-Sébastien-sur-Loire (44230) 605€ Découvrir
Chambre meublée, idéale jeune travailleur
Chambre meublée, idéale jeune travailleur La Tronche (38700) 390€ Découvrir
Automobile
Opel Corsa électrique
Opel Corsa électrique Jullouville (50610) 16 200€ Découvrir
renault captur techno full hybride etech 145
renault captur techno full hybride etech 145 Nointot (76210) 0€ Découvrir
Toyota Yaris IV Première 2021 en très bon état
Toyota Yaris IV Première 2021 en très bon état Lyon (69001) 22 900€ Découvrir
4 pneus DUNLOP SPORT MAXX RT 2 – état récent – à saisir
4 pneus DUNLOP SPORT MAXX RT 2 – état récent – à saisir Le Plessis-Robinson (92350) 150€ Découvrir
Bonnes affaires
Poêle à bois
Poêle à bois Plérin (22190) 1 800€ Découvrir
Poussette
Poussette Châteauneuf-sur-Loire (45110) 100€ Découvrir
Siège auto
Siège auto Châteauneuf-sur-Loire (45110) 30€ Découvrir
Chaise de bureau Seattle – Confort, design & vérin à gaz NEUF
Chaise de bureau Seattle – Confort, design & vérin à gaz NEUF Le Plessis-Robinson (92350) 80€ Découvrir
L'application mobile de Tendance Ouest
Inscrivez vous à la newsletter
Les pronostics avec Tendance Ouest
L'emploi avec Tendance Ouest
L'agenda des sorties de Tendance Ouest
Les concerts avec Tendance Ouest
Au Bélarus, l'histoire oubliée des "enfants de France" rapatriés en URSS