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En Chine, une ethnie tibétaine délaisse sa liberté sexuelle

Plus jeune, Trinley Norbu escaladait au clair de lune la maison des filles qu'il convoitait, avant de pénétrer dans leur chambre. Mais aujourd'hui les aventures d'un soir, jadis la norme chez son ethnie tibétaine du sud-ouest de la Chine, n'ont plus beaucoup la cote.

En Chine, une ethnie tibétaine délaisse sa liberté sexuelle
Une femme de l'éthnie tibétaine des Zhaba sur le toit de sa maison dans la vallée du fleuve Yalong, dans la province chinoise du Sichuan, le 28 mai 2017 - Johannes EISELE [AFP]

Pour ce chauffeur routier de 37 ans, l'aptitude à la varappe a longtemps constitué un moyen de séduction bien plus efficace qu'une invitation à dîner ou au cinéma, dans sa communauté dominée par les femmes et basée dans la province du Sichuan.

Forts de 14.000 membres, les Zhaba rejettent le mariage, au profit d'une vie sexuelle sans engagement de fidélité. La tradition ici, ce sont les "mariages ambulants": un terme qui désigne ces virées coquines, en référence aux longues marches entreprises par ces messieurs pour rejoindre leur compagne d'un soir.

Mais cette pratique disparaît progressivement de cette région isolée des contreforts du plateau tibétain. Car aujourd'hui, les femmes exigent un engagement un peu plus fort de la part de leurs partenaires sexuels, explique Trinley Norbu.

L'arrivée d'internet, des smartphones et des séries télévisées sentimentales sud-coréennes, couplée au développement des moyens de transport et des opportunités d'études, ont inexorablement exposé les Zhaba à d'autres modes de vie.

"Les femmes commencent désormais à vouloir les mêmes choses qu'ailleurs: des mariages fixes et des biens matériels comme une maison ou une voiture", explique-t-il.

Et un défi encore plus grand se profile à l'horizon: la construction dans les environs d'un des plus grands barrages du monde entraînera prochainement l'engloutissement de la vallée. Les villageois devront se loger ailleurs et seront donc dispersés.

"C'est désolant. Ils ont mis notre région sens dessus dessous et on n'a pas notre mot à dire là-dedans", peste Trinley Norbu, qui travaille pourtant sur le chantier de l'ouvrage.

Une jalousie nouvelle

Son ami Khando Tsering fixe les gigantesques piliers de béton inachevés d'une autoroute qui bientôt réduira de moitié le temps de transport vers la ville la plus proche et apportera le tourisme à cette enclave autrefois préservée du monde moderne.

"L'économie va se développer et le comportement des gens va être perverti. Tout sera question d'argent et nos traditions locales vont disparaître", prédit-il.

Le "mariage ambulant" a commencé à décliner dans les années 80 avec la politique de limitation des naissances. Celle-ci a institué des amendes pour les mères dont les enfants n'avaient pas de père déclaré, les obligeant de facto à obtenir des certificats de mariage officiels.

La percée des mariages classiques depuis 30 ans a développé chez les Zhaba la notion de jalousie, un sentiment jusque-là rarement exprimé ouvertement, souligne dans une étude l'anthropologue Feng Min, de l'Université normale du Qinghai (nord-ouest).

Selon cette étude portant sur 232 foyers, seuls 49% d'entre eux perpétuaient encore en 2004 la tradition des unions libres.

Les enfants nés dans ces familles traditionnelles Zhaba restent auprès de leur mère. Quant aux pères, ils peuvent certes offrir un soutien financier, mais vivent en général avec leurs propres mères.

"Je n'ai pas de mari. Le père de mes enfants habite ailleurs", explique la matriarche Dolma Lhamo, 60 ans, en allant entretenir ses champs de pommes de terre avec deux de ses filles.

Pema Bazhu, une commerçante, raconte qu'elle habitait auparavant avec sa mère, sa grand-mère, ses soeurs et ses oncles. Mais elle est partie vivre avec son mari et leur fils de 2 ans. "C'est plus pratique et c'est mieux pour élever les enfants."

'Plus aussi drôle qu'avant'

Quand Tsultrim Paldzone, 30 ans, était plus jeune, lui et ses amis participaient à un rituel de séduction. Lors des fêtes ou des jours de marché, ils dérobaient aux filles qu'ils voulaient séduire un jeton qu'elles gardaient sur elle. Un attribut qu'ils devaient ensuite leur rendre lors d'une visite nocturne...

"Quand elle était d'accord, elle courait un peu plus lentement. Et si elle était vraiment contre, alors elle ne vous laissait pas prendre le jeton, peu importe l'abnégation dont vous faisiez preuve !", explique en riant ce peintre de fresques.

A l'époque, les voitures étaient rares. Et il se rappelle d'avoir un jour marché 10 kilomètres, du coucher du soleil jusqu'à minuit, pour atteindre la maison de son amoureuse d'un soir.

Aujourd'hui, personne dans la petite communauté n'habite à plus d'une demi-heure de trajet en moto l'un de l'autre. Les rendez-vous galants sont calés à l'avance via la populaire messagerie pour smartphone WeChat et la fausse pudeur du jeu du jeton a pratiquement disparu.

"Il n'y a plus de défi. Ce n'est clairement plus aussi drôle qu'avant", regrette Tsultrim Paldzone.

La bureaucratie administrative, elle aussi, rend plus difficile la perpétuation des mariages ambulants. Car les enfants nés hors mariage en Chine ont un accès beaucoup plus difficile aux soins médicaux ou à la scolarisation.

Aujourd'hui, ceux qui veulent perpétuer les mariages ambulants sont contraints de trouver des proches ou des personnes extérieures - célibataires - pour obtenir des certificats de mariage de complaisance, explique Tsultrim Paldzone. "Le gouvernement ne nous laisse pas faire les choses comme nous l'entendons."

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