Les négociations nucléaires avec l'Iran se sont emballées vendredi, les grandes puissances appelant avec insistance Téhéran à saisir la "chance" d'un accord historique, tandis que leur interlocuteur iranien s'apprêtait à regagner son pays pour des consultations.
Après des mois de discussions techniques, cette séquence purement politique a été lancée par un long entretien, jeudi soir dans un palace de Vienne, entre le chef de la diplomatie américaine, John Kerry, et son homologue iranien Mohammad Javad Zarif.
Les deux hommes se sont à nouveau réunis pendant deux heures en fin de matinée, en compagnie de l'ex-représentante européenne Catherine Ashton, qui continue de coordonner la négociation.
M. Zarif pourrait désormais retourner à Téhéran pour des consultations, le reste de la délégation iranienne restant à Vienne.
M. Kerry va de son côté s'entretenir dans la soirée à Paris avec ses homologues européens.
"Je pense que Zarif rentre pour présenter les résultats de sa réunion avec Kerry, qui pourrait avoir ouvert la porte à des évolutions sur les sujets encore en discussion, et pour recevoir des instructions", a estimé pour l'AFP l'analyste Kelsey Davenport, de l'Arms Control Association.
- 'Intention sérieuse d'aboutir' -
Selon cette experte, le départ de M. Zarif "montre qu'il y a une intention sérieuse d'aboutir à un accord à la date-limite du 24 novembre, et que l'on en est proche".
A quelques dizaines d'heures de cette date-butoir, les désaccords sont aplanis sur de nombreux points entre l'Iran et les grandes puissances du "5+1" (Chine, Etats-Unis, France, Russie, Royaume-Uni et Allemagne). Mais deux divergences majeures subsistent.
Les "5+1" veulent que la République islamique réduise fortement sa capacité d'enrichissement d'uranium, afin qu'elle soit privée durablement de la possibilité d'obtenir l'arme atomique. L'Iran veut à l'inverse conserver, et même amplifier cette capacité, dont le pays dit avoir besoin pour alimenter ses futures centrales nucléaires.
Selon des sources occidentales, l'Iran réclame par ailleurs une levée immédiate de toutes les sanctions qui lui ont été infligées au long d'une décennie de controverses sur son programme atomique.
Téhéran a toujours nié que ce programme ait des visées militaires, et dénonce comme une injustice les sanctions qui entravent son économie. Le "5+1" juge pour sa part irréaliste de les lever immédiatement.
- "Tous les ingrédients sur la table" -
Seule une impulsion politique paraissait à même, vendredi matin, d'éviter l'impasse, alors que les deux camps ont reconnu que le climat des négociations était tendu.
"Tous les ingrédients pour un accord sont sur la table", a assuré depuis Moscou le ministre russe Sergueï Lavrov: "Peut-être existe-t-il une tentation, à ce stade avancé des négociations, de lancer quelques idées supplémentaires afin d?obtenir un peu plus que ce dont on a besoin."
C'est dans ce contexte que Laurent Fabius et Philip Hammond, les ministres des Affaires étrangères français et britannique, sont arrivés à la mi-journée pour jeter leur poids dans la balance, l'espace de quelques heures de présence à Vienne.
M. Fabius a invité l'Iran à "saisir l'opportunité" d'un accord. La République islamique aurait "énormément à y gagner, a renchéri M. Hammond : l'accès à des montants très importants d'avoirs gelés, la capacité de commercer de nouveau librement avec le monde, et de faire redémarrer les relations avec la communauté internationale."
- "Je souligne le mot chance" -
John Kerry a lui qualifié la discussion en cours de "chance" - "Et je souligne le mot chance", a-t-il insisté.
Un accord redonnerait du souffle à l'économie iranienne, en particulier grâce à la levée de l'embargo occidental sur le pétrole iranien. Il ouvrirait aussi la voie à une normalisation des relations entre l'Iran et l'Occident, rendant possible des coopérations, notamment dans les crises en Irak et en Syrie.
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