Message d'apaisement ou signal de fermeté? La parole du président de la République sera scrutée de près mardi soir, alors que le conflit social contre le projet de "système universel" de retraite par points est déjà plus long que celui de 1995.
Rien ne filtrait lundi sur la teneur de ces voeux télévisés du côté de Matignon, en première ligne sur ce dossier, où l'on insistait sur la volonté de "rester silencieux" avant l'intervention présidentielle.
Quasi muet sur les retraites depuis des semaines, le chef de l'Etat s'est contenté d'un appel, en vain, à la trêve pour Noël et a fait savoir qu'il renonçait à sa pension de président, avant de se retirer au fort de Brégançon.
Il s'est ainsi ménagé une possible fenêtre de tir pour débloquer la situation le 31. Sauf s'il opte pour le bras de fer, au risque de radicaliser les opposants.
"Je pense qu'il est grand temps d'appuyer sur le bouton stop", a redit lundi sur franceinfo le secrétaire général de Force ouvrière, Yves Veyrier, pour qui "le projet se délite, à l'évidence".
"Ca fuit de toutes parts et le gouvernement est obligé de colmater les brèches" en multipliant les concessions, a-t-il relevé. "On s'aperçoit que (le futur système) ne fonctionne pas pour telle ou telle profession, que ce soient les pilotes, les pompiers, les danseurs de l'Opéra...", a énuméré le dirigeant syndical, partisan d'un retrait total du projet.
Même revendication à la CGT-Cheminots, fer de lance d'une contestation sans pause. "La trêve, c'est la défaite", a estimé sur RFI Mathieu Bolle-Reddat, leader de cette fédération cégétiste à Versailles.
"Vous ne pouvez pas dire à des salariés qui ont perdu 25 jours de salaire +bon bah c'est pas grave, on arrête+ alors qu'on est encore au milieu du gué", fait-il valoir. Pour ce syndicaliste cheminot, les grévistes sont d'autant plus "déterminés" que le gouvernement est "extrêmement brutal, agressif, méprisant".
Le ton, de fait, est monté d'un cran dimanche entre l'exécutif et les opposants les plus déterminés à la réforme.
Le secrétaire d'Etat aux Transports, Jean-Baptiste Djebbari, a reproché à la CGT de pratiquer un syndicalisme "de blocage" voire "d'intimidation" quand le numéro un de la centrale, Philippe Martinez, accusait le gouvernement d'organiser "le bordel" et de jouer "le pourrissement" d'un conflit lancé le 5 décembre.
"On est fatigués"
La seconde semaine des vacances scolaires a donc commencé lundi par un 26e jour consécutif de grève à la SNCF et à la RATP.
A la veille du réveillon de la Saint-Sylvestre, il fallait compter sur seulement 1 TGV sur 2, 1 Transilien sur 4 et 3 circulations de TER (souvent assurées par des cars) sur 10.
Le trafic RATP a certes connu une "amélioration significative" selon la régie, avec 14 lignes de métro fonctionnant normalement (lignes 1 et 14) ou partiellement, et des RER A et B circulant de 06H30 à 19H30. Mais pendant la nuit de la Saint-Sylvestre, seules les lignes automatiques 1 et 14 circuleront jusqu'à 02H15 du matin.
A la gare Saint-Lazare à Paris, les usagers se partageaient entre soutien au mouvement et lassitude face à un conflit qui dure et dont personne ne voit l'issue.
"Ca commence à être fatigant, on est fatigués, en même temps on soutient le mouvement, voilà", expliquait à l'AFPTV Julie, qui travaille dans l'immobilier.
"J'ai fait du télétravail. Mais nous on est dans le privé, pas dans le public, à force d'être absents, on risque d'avoir des conséquences vis-à-vis de notre patron", pestait Oliver, architecte d'intérieur habitant à Mantes-la-Jolie (Yvelines).
Les opposants à la réforme ont mené plusieurs opérations de blocage dans la matinée.
Au moins deux dépôts de bus parisiens ont dû être débloqués par les forces de l'ordre, selon la RATP. A Brest, des manifestants ont temporairement empêché le départ de "cars Macron" utilisés, selon l'union départementale FO, pour "casser la grève". Dans le Calvados, des grévistes ont occupé plusieurs voies de chemin de fer avant d'être délogés par la police, selon la SNCF.
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