Les recommandations du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) sont sans appels. Et elles sont peu flatteuses pour le centre hospitalier psychiatrique du Rouvray, près de Rouen (Seine-Maritime), l'un des plus importants de France. L'établissement a été visité du 7 au 18 octobre 2019 par douze contrôleurs de la mission, qui ont fait le constat "d'un nombre important de dysfonctionnements et d'atteintes graves aux droits fondamentaux des personnes hospitalisées dans cet établissement".
Parmi les observations du CGLPL figurent notamment :
Des conditions d'hébergement dégradées, aggravées par la suroccupation des unités. Il est demandé de mettre fin aux conditions indignes d'accueil et précisé que "l'occupation des lits d'hospitalisation complète ne doit pas dépasser la capacité de l'établissement."
Des atteintes à la liberté d'aller et venir de l'ensemble des patients. Le CDLPL précise que "l'enfermement des patients en soins sans consentement pendant l'hospitalisation complète n'étant pas intrinsèque à ce mode juridique de soin, cette contrainte de principe dans la liberté d'aller et venir au sein de l'hôpital doit cesser. Elle est particulièrement injustifiable pour les patients en soins libres."
Des mesures d'isolement prises en contradiction avec les textes applicables, et portant gravement atteinte à la dignité humaine. L'isolement et la contention doivent toujours constituer des pratiques de dernier recours, et une politique d'établissement doit être définie afin d'en limiter l'usage.
Des enfants hospitalisés avec des adultes, et parfois enfermés dans des chambres d'isolement. Les patients mineurs ne doivent pas être accueillis avec des adultes. Dans tous les cas, leur suivi doit s'exercer sous le contrôle étroit d'un médecin et d'une équipe, formés spécifiquement à la pédopsychiatrie.
"Une violence institutionnelle"
Du côté des syndicats de l'établissement, on salue un rapport qui met en exergue des remarques qui sont faites depuis des mois et qui avaient donné naissance à une grève de la faim en 2018 et à une rentrée sociale compliquée en 2019.
"Si moi en tant qu'infirmier, je mets quelqu'un en isolement ou que des fois je l'attache, c'est parce que je n'ai pas assez de collègues avec moi pour m'occuper de lui, explique Jean-Yves Herment, infirmier et représentant CFDT. Ce n'est pas ma volonté de soignant. C'est de la maltraitance institutionnelle."
Pour l'infirmier, rien de nouveau sous le soleil donc. "Quelles sont les réponses de notre direction ? L'unité pour adolescents n'est pas prévue avant novembre 2020, et encore, avec un point d'interrogation", peste-t-il.
De son côté, la direction, qui n'a pas souhaité répondre directement à nos questions, assure qu'elle va prendre l'urgence au bras le corps, en mettant sur pied un nouveau projet d'établissement.
Trois semaines pour répondre
Le CGLPL peut saisir les autorités compétentes de ses observations en leur demandant d'y répondre lorsqu'il constate une violation grave des droits fondamentaux des personnes privées de liberté. Dans ce cas, la ministre de la Santé et celle de la Justice ont été destinataires des recommandations et disposent d'un délai de trois semaines pour y répondre.
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