Féminisme. Le monde renversé : un spectacle autour de la femme à Rouen

Quatre jeunes comédiennes sont à l'origine de ce spectacle baptisé Le monde renversé dans lequel elles questionnent la place de la femme dans la société à travers la figure mythique de la sorcière. Itto Mehdaoui, comédienne du collectif Marthe, nous en parle.

Qu'est-ce que le collectif Marthe ?

"Marie-Ange Gagnaux, Aurélia Lüscher, Clara Bonnet et moi-même formons ce collectif. En octobre 2017 nous avons créé ensemble à Genève ce premier spectacle puis quand nous l'avons joué au Théâtre de la cité internationale à Paris nous avons pris la décision de nous réunir en collectif. Nous nous sommes toutes rencontrées à l'école de la comédie à Saint-Étienne dont nous sommes diplômées depuis 2015. Parmi nos projets d'étude, nous devions concevoir un spectacle et c'est ainsi qu'est né 'Le monde renversé'."

Quel est le postulat de base ?

"C'est le travail de l'universitaire Silvia Federici 'Caliban et la sorcière' qui nous a inspiré 'Le monde renversé'. Nous avions déjà l'idée de faire un spectacle sur les sorcières mais la lecture de cet essai a vraiment orienté nos choix. L'auteure tente d'écrire l'histoire des sorcières qu'elle met en relation avec l'avènement du capitalisme. C'est une étude qui commence à la fin du Moyen-Âge et s'étend jusqu'au XVII^e. À travers la figure de la sorcière, c'est la place de la femme dans la société qu'elle questionne. Dans ce spectacle, nous déconstruisons les stéréotypes qui pèsent sur la sorcière."

Pourquoi avoir choisi de parler de la femme à travers la sorcière ?

"Dans les années 70, certains mouvements féministes s'emparent de cette image maléfique qui pèse sur la femme. C'est un symbole de puissance et une forme de réassurance. La femme d'aujourd'hui pâti toujours de cette chasse aux sorcières. Nous avons imaginé pour ce spectacle de suivre le destin de siècles en siècles d'une sorcière nommée Marthe qui finira sur le bûcher au XVII^e siècle. Tous ces épisodes sont entrecoupés de scènes contemporaines : nous faisons de constants parallèles avec l'époque actuelle et la diabolisation du corps de la femme."

Qui joue le rôle de Marthe ?

"Marthe apparaît en filigrane tout au long du spectacle. Nous avons choisi de répartir ce rôle : chacune d'entre nous l'incarne à tour de rôle, mais nous incarnons aussi des rôles masculins, des personnages caricaturaux parfois risibles comme le grand inquisiteur. Marthe, c'est nous toute et aurait pu être n'importe qui. C'est notre façon de dénoncer les stéréotypes : par exemple la sorcière dans la tradition populaire enfourche son balai, or le balai est un accessoire domestique dont toutes les femmes se servent au quotidien quelle que soit l'époque. La sorcière c'est la femme qu'on ostracise parce qu'on en a peur."

Du 18 au 21 décembre 2018 au Théâtre des deux rives à Rouen. 10 à 15€. cdn-normandierouen.fr