Le leader souverainiste avait misé son va-tout sur ce scrutin régional, sillonnant sans relâche un territoire dominé par le Parti communiste italien puis le centre-gauche depuis 70 ans.
Au final, c'est le président sortant de la région, Stefano Bonaccini (PD, centre gauche), qui l'a emporté largement avec 51,4% sur la candidate de la Ligue de Salvini, Lucia Borgonzoni avec 43,6%, selon les résultats officiels diffusés lundi.
Les investisseurs internationaux ont réagi avec soulagement: le "spread", le très surveillé écart entre les taux italiens et allemands à 10 ans reculant fortement à 140,6 points contre 156,5 points.
"Ce matin personne ne sonnera au Quirinal (palais présidentiel) pour réclamer des élections anticipées", a commenté l'éditorialiste politique Stefano Folli dans le quotidien Repubblica, estimant que Salvini a "péché par excès d'assurance et même une certaine arrogance".
Celui que ses troupes surnomment le "Capitano" avait promis d'aller présenter un "avis d'expulsion" au gouvernement de Giuseppe Conte, qui s'appuie sur une majorité formée par le PD (centre gauche) et le Mouvement Cinq Etoiles (M5S, anti-establishment). Il a assuré lundi depuis Bologne que "ce n'est que partie remise".
Premier parti d'Italie
Mais pour Stefano Folli, cette défaite de l'ex-homme fort du gouvernement Ligue-M5S (juin 2018/août 2019) "confirme l'urgence de changer quelque chose dans son message médiatique et sa manière d'aborder la politique".
"Sa stratégie du coup d'épaule (pour renverser le gouvernement, ndlr) s'est transformée en boomerang, peut-être que certains lui demanderont une ligne moins extrémiste", a renchéri Massimo Franco, éditorialiste du Corriere della Sera.
Fort d'intentions de vote le créditant de plus de 30% des voix, soit théoriquement le premier parti d'Italie, Salvini avait défié la gauche dans l'un de ses fiefs en surfant notamment sur le mécontentement d'une classe moyenne inquiète des effets de la mondialisation dans une région pourtant prospère et championne en matière de santé et éducation.
"L'histoire italienne récente enseigne que lorsqu'on organise un référendum sur sa personne on le perd, comme cela a été le cas de Matteo Renzi", l'ex-chef du PD fin 2016, souligne à l'AFP Emiliana De Blasio, professeure de sciences politiques à l'université Luiss de Rome.
Pour cette chercheuse, le PD a bénéficié clairement de l'émergence des Sardines, un mouvement civique né il y a seulement deux mois, justement à Bologne, qui a mobilisé l'électorat de gauche alimentant une participation énorme (67,7% contre 37% aux précédentes régionales de 2014).
Leurs enseignements au PD sont que "bien gérer (la région) comme l'a fait Bonaccini ne suffit pas, il faut savoir bien communiquer, et (qu')on ne gouverne pas sans les places (le soutien populaire)", souligne Mme De Blasio, pour qui l'Italie se confirme comme un "laboratoire politique" pour l'Europe.
"Trou noir" des Cinq Etoiles
Selon cette chercheuse qui étudie les Sardines de près, "c'est un mouvement original né de l'opposition à Salvini mais devenu un agrégateur de causes transnationales comme Fridays for Future (défense du climat) et qui se réfère aux valeurs européennes".
Dans l'immédiat, les Sardines ont annoncé qu'elles "retournent en coulisses". Sans doute jusqu'au prochain scrutin important.
Si le gouvernement PD/M5S peut tirer un soupir de soulagement, il ne sort pas pour autant renforcé du scrutin de dimanche, selon les experts.
L'effondrement du Mouvement 5 Etoiles (sous les 10%) alors qu'il était le premier parti italien aux législatives de 2018 avec environ 32%, est l'une des principales données du scrutin.
L'avenir de la coalition dépendra, selon les experts, de la stratégie du M5S qui n'a plus de patron depuis la semaine passée après la démission de Luigi di Maio, resté chef de la diplomatie italienne.
"Avec un M5S effacé ou presque, mais significatif au parlement, que compte faire le PD", s'interroge Stefano Folli, qui parle de "trou noir" et cite des dossiers potentiels d'affrontement entre les partenaires de coalition comme la prescription des procès, et une possible révocation des concessions autoroutières à la famille Benetton pour l'affaire du Pont de Gênes.
Pour Emiliana De Blasio, le sort de la coalition dépendra des choix de M5S: "soit ils décident de débrancher le gouvernement et de se reconstruire dans l'opposition, soit ils se refondent à travers les états généraux du mouvement" prévus en mars.
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