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Embrouilles et bonnes affaires: dans les coulisses de marchés de banlieue parisienne

Dans le monde des marchés géants de banlieue parisienne, les bonnes affaires sont reines et tout se règle en liquide. Commerçants, placiers, concessionnaires, voire quelques voyous y cohabitent et la justice doit parfois s'en mêler.

Embrouilles et bonnes affaires: dans les coulisses de marchés de banlieue parisienne
Le marché d'Aubervilliers au nord de Paris, le 18 juillet 2019 - Martin BUREAU [AFP/Archives]

"Tu peux te mettre là si tu veux mais tu vas avoir des problèmes avec la police", prévient un placier du marché du Val Fourré. Le grand gaillard tente de mettre de l'ordre dans les dizaines d'étals, aux pieds des tours de cette cité de Mantes-la-Jolie, dans les Yvelines. Le marchand, qui parle à peine français, hausse les épaules.

"Il est Afghan, il a vu la guerre, qu'est-ce que tu veux que je fasse ? Il en a rien à faire de la police française", s'amuse le placier qui préfère rester anonyme. Les commerçants défilent. L'un conteste la place qu'on lui a attribuée, un autre, en conflit avec son voisin, demande une médiation.

Les "embrouilles" sont récurrentes dans ce centre commercial à ciel ouvert. Mais, au Val Fourré, c'est un scandale qui a marqué les esprits en avril, lorsque trois placiers et un employé de la mairie ont été mis en examen et incarcérés pour "extorsion en bande organisée" sur les commerçants.

"Un petit système mafieux" qui leur aurait rapporté plusieurs "dizaines de milliers d'euros" sur plusieurs années, selon une source proche du dossier.

L'affaire a continué de faire des vagues: mi-juin, deux camions de commerçants ont été brûlés non loin du marché, un évènement lié à l'enquête, selon la même source.

Des éventuelles malversations facilitées par un milieu où la majorité des transactions se fait toujours en liquide. Entre acheteurs et vendeurs, mais aussi entre placiers et commerçants qui paient un loyer pour leur emplacement.

"A part les trafiquants de drogue, j'ai rarement vu des mecs se trimballer avec autant d'espèces", raconte Jérôme Borzakian, avocat d'un commerçant d'Argenteuil.

La "brute" et les coups de feu

A Mantes-la-Jolie, Argenteuil, Saint-Denis ou encore Sarcelles, les marchés géants de banlieue parisienne sont des institutions. Pantalons à deux euros, chaussures à moins de dix euros, sans compter l'alimentaire à prix cassé... Tout s'y vend à des tarifs défiant toute concurrence.

Le marché, "c'est comme une église, ça fait partie du patrimoine", compare Rachida Kabbouri, commerçante à Choisy-le-Roi et présidente du syndicat des commerçants de cette ville du Val-de-Marne. A Argenteuil, "après la mairie et Dassault, c'est le 3e employeur de la ville", affirme un commerçant.

Présents dès 6H00 à l'ouverture des marchés jusqu'au remballage des marchandises, les placiers sont des rouages essentiels. "Pas de bons marchés sans bons placiers", résume Monique Rubin, présidente de la Fédération des syndicats des commerçants des marchés de France.

Elle défend un métier difficile avec des salaires modestes. Diplomatie et fermeté sont nécessaires pour faire tourner la machine.

"Nos commerçants ne sont pas des tendres", poursuit-elle. Il y a des "règlements de comptes, des vols à l'étalage" donc "pour tenir un marché où il y a 3 ou 400 commerçants il faut pas être nunuche".

Troudi Haikel, placier sur plusieurs marchés de Seine-Saint-Denis et du Val-d'Oise, en sait quelque chose. Ce trentenaire costaud travaille pour Mandon, l'une des six sociétés qui gère les marchés en région parisienne.

Il raconte ses débuts sur le marché des 3.000, à Aulnay-sous-Bois, il y a sept ans. Une vraie scène de film. "Je rentre dans un café, personne. Je m'assois avec un collègue et je vois une bande entrer. Ils nous ont encerclés et ont tiré vers les jambes. Je n'ai pas été touché", glisse-t-il. "Ils voulaient nous intimider. Ils sont venus s'excuser quelques mois après".

Pour se faire accepter au marché, il a fait appel à une figure du quartier. Son surnom: "la Brute". "Mais il est très gentil", assure le placier. La mairie, elle, se dit "très satisfaite" de la gestion Mandon.

En Île-de-France, la plupart des municipalités confient la gestion des marchés à des sociétés privées. "C'est pas notre métier de faire des marchés forains", explique Raphaël Cognet, maire LR de Mantes-la-Jolie. "Un marché ça rapporte pas, ça coûte", dit-il, en listant l'ensemble des frais: nettoyage, organisation…

Un "fric colossal"

Ces sociétés se disputent "un fric colossal", selon Mme Rubin.

Certains commerçants leur reprochent des pratiques opaques. "Les mairies sont sous le joug des concessionnaires. Ils font ce qu'ils veulent", affirme ainsi Mme Kabbouri qui déplore une augmentation du prix des places de 60% en trois ans à Choisy-le-Roi, sans consultation des représentants de commerçants.

Ces derniers ont saisi le tribunal administratif. La mairie justifie les prix notamment par "la livraison de nouvelles halles offrant un meilleur cadre aux commerçants". La société gestionnaire Géraud n'a pas donné suite aux demandes de l'AFP.

A Argenteuil, deux commerçants ont déclaré la guerre à la société Mandon. Ils dénoncent notamment des factures d'eau et d'électricité abusives. "J'ai l'impression qu'on nous vole", explique l'un d'eux, Halim Kaïs, qui dirige une entreprise de fruits et légumes avec son frère et prévoit de saisir la justice.

Des "mensonges", rétorque Yves Askinazi, patron de Mandon. "Les factures payées sont refacturées à l'euro près concernant les fluides".

Dans les allées du marché Héloïse, l'un des six marchés de la ville et l'un des plus grands d'Ile-de-France avec ses 500 commerçants, personne pour confirmer les accusations.

"C'est réglo ici, c'est pas Mantes-la-Jolie", lance Chérif, énergique délégué des commerçants. "Personne n'est venu se plaindre auprès de moi", ajoute, derrière son stand d'articles pour bébés, Kamel Khelassi, le président des commerçants.

Si aucun marchand ne parle, c'est parce qu'ils "ont peur", balaie Halim Kaïs.

Du côté de Mandon, on y voit des basses manœuvres en pleine procédure d'appel d'offres pour le renouvellement de la gestion des marchés d'Argenteuil, qu'il a finalement gardée. L'argent des marchés franciliens, plus encore que les promotions sur les étals, suscite des convoitises.

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