Ce scrutin, dimanche, a été marqué par un faible taux de participation -49,2%- ainsi que par l'émergence d'un mouvement de la société civile contestant les partis au pouvoir et qui devrait remporter deux sièges au Parlement (sur 128).
Si le partage du pouvoir au Liban entre les différentes communautés religieuses empêche la suprématie d'un seul parti ou d'une communauté au sein de l'hémicycle, le Hezbollah, très populaire dans ses bastions, devrait conforter sa position grâce aux alliances qu'il pourrait tisser ou renouveler.
Les estimations du parti chiite, quelques heures après le début du dépouillement, indiquent qu'il a raflé la mise quasiment partout où il était présent.
Et alors que les résultats officiels sont attendus dans la journée, le Premier ministre sunnite Saad Hariri a reconnu que son mouvement, le Courant du Futur, grand rival du Hezbollah, perdait un tiers de ses sièges.
Le parti disposera de 21 députés, a annoncé M. Hariri lors d'une conférence de presse, contre 33 dans le Parlement sortant.
"Nous avions parié sur un meilleur résultat et un bloc plus large", a-t-il admis, s'exprimant en toute décontraction, plaisantant avec les journalistes.
"Grande influence"
"La reconduction de M. Hariri au poste de chef de gouvernement n'est toutefois pas menacée", a affirmé à l'AFP le politologue Karim el-Mufti.
Le revers du camp Hariri intervient six mois après le feuilleton de sa démission surprise depuis Ryad, qui avait suscité une vaste mobilisation populaire et diplomatique.
Mécontente des compromis du Premier ministre vis-à-vis du Hezbollah pro-iranien, l'Arabie saoudite avait finalement laissé le fils de l'ex-Premier ministre assassiné Rafic Hariri rentrer sous les vivats au Liban.
Les premières tendances laissent penser que le Hezbollah devrait, avec ses alliés, pouvoir forger plus facilement une majorité en sa faveur, sur des questions clés telles que celle des armes, qu'il n'a jamais déposées après la guerre civile (1975-90).
Dans un contexte de fortes tensions régionales autour du rôle de l'Iran, principal parrain du mouvement chiite, "le Hezbollah est bien parti pour avoir une grande influence dans le processus décisionnel" au Liban, a indiqué à l'AFP M. Mufti.
Créé au début des années 1980 dans la foulée de la Révolution islamique iranienne pour lutter contre Israël, le Hezbollah combat actuellement en Syrie aux côtés du régime de Bachar al-Assad.
Il est considéré comme une organisation "terroriste" par les Etats-Unis, et cinq de ses membres ont été accusés dans l'assassinat en 2005 de Rafic Hariri.
Les nouveaux contours du Parlement pourraient en parallèle laisser le parti chrétien du président Michel Aoun jouer le rôle d'arbitre auquel il prétend, avec environ 28 sièges, selon les dernières estimations non officielles.
"Le plus grand acteur sera le groupe du président Aoun, qui évoluera parmi les blocs non alignés, et le Hezbollah bénéficiera de ce fait de l'absence d'une large coalition" face à lui, a expliqué le politologue Imad Salamey.
"Nous croyons au changement"
Au Liban, les précédentes législatives remontaient à 2009: le mandat du Parlement avait été prorogé à trois reprises en arguant des risques pour la sécurité du pays liés à la guerre en Syrie voisine.
Un taux de participation plus élevé était ainsi prévu mais le nouveau code électoral ainsi que les bulletins de vote pré-imprimés semblent avoir dérouté des électeurs.
Le nouveau code est basé sur un système proportionnel complexe, et "ni les électeurs ni les responsables de bureaux de vote ne sont encore familiers avec (lui)", a déclaré le ministre de l'Intérieur, Nohad Machnouk.
Malgré cette participation décevante, et en dépit de quelque 800.000 nouveaux électeurs, la nouvelle loi électorale, plus représentative, doit permettre à une liste de la société civile de faire son entrée au Parlement.
Deux femmes, la journaliste de télévision Paula Yacoubian et l'auteure Joumana Haddad, devraient l'emporter, selon leur coalition.
Les deux militantes se sont engagées à "défier" l'establishment politique qu'elles jugent corrompu.
"Nous attendons maintenant 2022 avec impatience, et nous croyons vraiment que le changement a commencé", a clamé Alexandre Salha, un volontaire de 30 ans de cette coalition.
"Si nous gagnons un ou deux sièges aujourd'hui, nous en aurons 10 dans quatre ans", a-t-il jugé.
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