Les musulmans de tous âges ont répondu par milliers à l'appel à la grande prière du vendredi sur l'esplanade des Mosquées à Jérusalem-Est, sans que la levée des restrictions israéliennes leur fasse oublier leur rancoeur et leur crainte d'une nouvelle escalade des violences.
Entre 37 et 40.000 fidèles se sont pressés à travers les rues de la Vieille ville, placée sous la surveillance de centaines de policiers israéliens, pour franchir les portes de l'esplanade et remplir la mosquée Al-Aqsa pour les hommes, et le dôme du Rocher pour les femmes, a indiqué Amr Kassouani, un responsable du lieu.
Pour le deuxième vendredi de suite, les check-points israéliens disposés aux portes de l'esplanade ont laissé passer hommes, femmes et enfants sans limite d'âge. Les policiers se contentaient de s'assurer au hasard qu'untel avait bien un permis de présence à Jérusalem et de prendre à certains jeunes hommes leur pièce d'identité en échange d'un ticket.
Les autorités avaient levé la semaine précédente pour la première fois depuis longtemps l'interdiction d'entrer faite aux hommes jeunes, les plus susceptibles de causer des troubles à leurs yeux. L'idée était de faire baisser la température autour du baril de poudre religieux qu'est l'esplanade.
Elles ont reconduit ces dispositions vendredi dans un contexte encore plus explosif, à la fin d'une nouvelle semaine de violences marquée par l'attentat le plus meurtrier commis à Jérusalem depuis 2008.
- 'C'est trop risqué ici' -
L'esplanade, troisième lieu saint pour les musulmans et site le plus sacré pour les juifs, est au coeur des tensions qui parcourent Jérusalem, touchent aussi Israël et la Cisjordanie occupée et font redouter un embrasement généralisé.
Avec l'attentat de mardi, au cours duquel deux Palestiniens ont tué quatre rabbins pendant la prière et un policier avant d'être abattus, les violences ont semblé menacer de prendre une nature confessionnelle encore plus dangereuse.
Les fidèles appréciaient vendredi de pouvoir prier librement à Al-Aqsa. Mais ils refusaient d'être dupes.
Le ressentiment, jusqu'à la colère chez les plus jeunes contre le gouvernement israélien, le Premier ministre Benjamin Netanyahu, les colons et les extrémistes juifs était intact. La plupart craignaient ou s'attendaient à ce que la situation ne se détériore encore.
Si les Israéliens ont levé toute limite d'âge, "c'est dans leur propre intérêt. Ils veulent faire croire qu'ils lèvent toutes les restrictions", dit Amir, un ingénieur venu de Cisjordanie prier ici, à la différence de beaucoup d'autres qui ont trop peur "parce que c'est trop risqué ici".
Les violences récentes "devaient finir par se produire () Depuis la guerre à Gaza, le moment était venu pour les Palestiniens de montrer qu'ils sont sous occupation", ajoute Amir, qui refuse de dévoiler son nom par crainte évidente d'attirer l'attention.
- Un motif de nouvelle Intifada -
Les milliers de morts de la bande de Gaza cet été, l'occupation, la poursuite de la colonisation, les arrestations par centaines, les brimades, le chômage nourrissent l'exaspération palestinienne. L'esplanade des Mosquées et la révérée mosquée Al-Aqsa qui s'y trouvent constituent une ligne rouge.
Les Palestiniens et les musulmans s'inquiètent des revendications de plus en plus pressantes d'une minorité juive extrémiste qui réclame le droit de prier sur l'esplanade. Ils dénoncent leurs visites de plus en plus fréquentes sur le site et perçoivent comme des profanations les incursions des policiers israéliens sur l'esplanade et même dans la mosquée Al-Aqsa lors d'incidents.
Al-Aqsa, d'où la deuxième Intifada passe communément pour être partie en 2000, "c'est notre mosquée", dit Wasel Qassem, radiothérapeute de 35 ans, "c'est un motif évident de nouvelle Intifada".
"Je suis inquiet. Les Israéliens essaient d'apaiser les choses à présent. Personne n'aime la violence. Mais la situation est explosive", dit Wasel Qassem, qui avait ressenti comme un emprisonnement et une insulte de ne pouvoir prier sur l'esplanade. "J'espère qu'elle n'explosera pas".
Abdullah Adhami, verrier de 24 ans, et Mohamad Chundi, 18 ans, font le même constat chez les proches de leur âge: "Il y a beaucoup de colère", dit Mohamad, "ce lieu est à nous. Si nous ne battons pas pour lui, nous le perdrons".
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.