Boris Czerny est professeur de langues et de civilisations russes à l'université de Caen.
Qu'avez-vous ressenti à la suite des annonces de Vladimir Poutine ?
J'ai été réveillé par des amis à 3 heures du matin. J'ai beaucoup de contacts en Ukraine et à Kiev en particulier. Je n'étais pas surpris. On pouvait s'attendre à une invasion. J'ai été toutefois sidéré et prêt à agir également. Je suis de père ukrainien et mère polonaise. Je suis allé de nombreuses fois en Russie. Je manie le russe, j'utilise constamment, je pense, je rêve en russe. C'est une culture, une identité qui est en moi.
Ça me touche des deux côtés, il y a des gens que je connais, que j'aime. Des amis, des proches…
Comment suivez-vous la situation ?
J'écoute beaucoup la télévision, les médias russes officiels, de l'opposition, la radio ukrainienne et biélorusse. Je navigue sur plusieurs supports.
Que pensez-vous de la situation ?
Il y a deux cultures. Deux pays. Ce que dit Poutine sur la non-existence de l'Ukraine est une grave erreur historique. L'Ukraine existe en tant qu'entité historique depuis très longtemps. Ce qui est fascinant, c'est comment cet homme s'est emparé du pouvoir en Russie, avec l'indifférence et le silence des milieux intellectuels. C'est un homme malade du point de vue intellectuel et psychologique. Il veut restaurer une grandeur russe. C'est stupéfiant.
Comment ont réagi vos amis ukrainiens ?
Ça fait déjà plusieurs jours qu'ils sont dans un état de guerre. Ils sont effrayés. Ils disent que ce sont des dépôts militaires qui sont frappés. D'autre part, il y a une guerre de l'information où certains lieux annoncés comme frappés ne le sont en fait pas. Ils essaient de faire la part des choses.
Et vos amis russes ?
Certains sont dans l'opposition. D'autres, des intellectuels, sont eux en accord avec l'action de Poutine. J'essaie de les persuader du contraire mais c'est peine perdue. Ils sont convaincus du bien-fondé de l'action, de la nature agressive de l'Occident, d'une sorte de continuité de la Seconde Guerre mondiale avec cette lutte contre des nazis ukrainiens. C'est un méli-mélo difficilement digérable mais qui est largement propagé en Russie.
Êtes-vous inquiet pour la suite ?
Je pense qu'il est capable d'aller très loin. On pensait qu'il ne voulait que deux petits bouts de territoire dans l'Ouest, maintenant il s'agit de toute l'Ukraine. Je ne vois pas pourquoi il n'irait pas en Transnitrie, territoire qui pose problème entre la Moldavie, la Roumanie et la Russie. Et puis pourquoi pas au-delà même. Les pays baltes… il faut prendre conscience qu'il n'y a pas de limite à son expansionnisme et à sa folie. On peut s'attendre au pire.
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Il va peut être aller à Caen ??