A trois mois des régionales et plus d'un an de la présidentielle, un doute ronge la classe politique française : peut-on encore – et faut-il – miser, une fois de plus, sur un tout-sauf-Le-Pen : un front républicain qui “ferait barrage” là où le parti lepéniste serait en mesure de l'emporter ?
Autrefois la réponse “républicaine” s'imposait d'elle-même. Elle semble ébranlée aujourd'hui dans l'opinion.
Ainsi les centaines d'électeurs de gauche interrogés par les médias : beaucoup avaient voté pour Emmanuel Macron contre Marine Le Pen en 2017, mais disent qu'ils ne le feront pas en 2022. Motif : ils ne supportent plus de voter au rebours de leurs idées en se contentant de faire simplement “barrage”. “On n'est pas des castors !”, grincent-ils.
Au second tour de la présidentielle de l'an prochain, ce sera – à les entendre – de deux choses l'une : ou bien il y aura de nouveau un duel Macron-Le Pen, et alors ils s'abstiendront plutôt que de regretter ensuite d'avoir donné leur voix à un projet qu'ils n'aimaient pas. Ou bien, rêvent-ils, “la gauche sera au second tour grâce une alliance sur un programme commun” : alors seulement ils voteront.
Ceux qui ont décidé de s'abstenir dans la première hypothèse envisagent avec flegme une victoire de Marine Le Pen. Ils disent ne pas la craindre, si la gauche enfin unie remportait les législatives de 2022 : “ce qui réduirait la présidente RN à l'impuissance”. C'est un pari aventureux.
L'enquête à gauche perturbe LREM
Publiées dans un quotidien parisien de gauche, ces réponses de lecteurs-électeurs ont explosé dans la classe politique. Et surtout à ‘La République en marche', dont les députés se divisent depuis des mois. Certains rejettent l'enquête : ainsi Christophe Castaner, qui accuse les réponses d'“épargner les extrêmes” ; François de Rugy, qui parle de “dérive” ; ou Anne-Christine Lang, qui accuse cette gauche d'avoir “perdu sa boussole et sa dignité”.
D'un autre côté, Aurore Bergé voit l'enquête comme une “prophétie autoréalisatrice” qu'il faut empêcher en privant Marine Le Pen de second tour.
Et d'un troisième côté, des députés LREM n'hésitent pas à faire du réalisme comme Jean-Baptiste Moreau ou Laetitia Avia, qui enterrent l'idée de front républicain… Ou à critiquer l'Elysée, comme Jean-Michel Mis, qui lui reproche de “peiner à définir un projet progressiste”.
Pendant ce temps, Marine Le Pen s'installe dans une posture de favori. Et renforce ce qui, croit-elle, l'y a menée : sa dédiabolisation, notamment en se modérant sur des sujets comme l'Europe… Modération qui lui fait perdre du terrain sur son extrême droite, qui l'accuse de banalisation. Le maire de Béziers Robert Ménard cherche donc à lui susciter un concurrent en 2022, peut-être en la personne du très médiatique Eric Zemmour.
Comment LR serait au second tour
A droite, ‘Les Républicains' cherchent à profiter de l'agitation générale. L'idée est d'empêcher Marine Le Pen d'être au second tour, grâce à un premier tour où une partie considérable de ses voix irait à Zemmour : la gauche restant désunie, c'est donc le candidat de la droite et du centre qui figurerait contre Macron au second tour… A trois conditions : que la gauche reste vraiment désunie ; que la droite et le centre n'aient pas, eux aussi, plusieurs candidats ; et que Zemmour se risque réellement dans la compétition ! LR est loin d'avoir tiré son épingle du jeu.
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