Le parquet de Bordeaux s'est dit lundi "convaincu" de la thèse de l'homicide volontaire, et n'exclut pas celle de "l'assassinat", donc de la préméditation, sur une fillette de 21 mois que son père est soupçonné d'avoir jeté vendredi dans la Garonne, deuxième "drame de la séparation" de ce type en dix jours.
"Nous sommes convaincus () qu'il s'agit d'un homicide volontaire sur mineur de (moins de) 15 ans", a déclaré le Procureur de Bordeaux, Marie-Madeleine Alliot, concernant l'homme de 34 ans mis en examen et placé en détention provisoire dimanche soir.
"Il n'est pas exclu que la thèse de l'assassinat soit retenue", a souligné la magistrate lors d'un point-presse. "S'il apparaît que le père a prémédité son geste, bien évidemment le parquet n'hésitera pas à requalifier les faits () en assassinat".
Le suspect affirme qu'il s'agit d'un accident, que sa fillette lui a échappé et est tombée vendredi vers 20H00 du Pont de Pierre qui enjambe la Garonne au coeur de Bordeaux, alors qu'il la tenait sur le parapet. Il reconnaît avoir eu une "attitude imprudente".
Mais plusieurs éléments, notamment des déclarations "incohérentes et contradictoires" du père, ont amené les enquêteurs de police à douter de sa version et accréditer l'homicide, selon le parquet. Le père a eu des versions différentes à la fois sur le comportement de l'enfant, la scène, sa propre position, celles de ses mains.
En outre, parmi les témoignages de rares passants, peu avant ou peu après la chute, des cyclistes ont décrit le père comme "ne paraissant pas particulièrement meurtri ou affecté" par la chute, "pas affolé mais très calme". La scène était assez sombre, ne se trouvait pas dans le champ de caméras de surveillance, a-t-on précisé auprès du parquet.
L'homme, sans antécédents judiciaires, vivait à Cavignac, à environ 40 km de Bordeaux, où il s'était rendu en train.
Le père était "fragilisé" par un contexte de séparation conflictuelle depuis juillet d'avec la mère de l'enfant; il devait bientôt passer devant un juge aux affaires matrimoniales pour statuer sur la garde de l'enfant. Or, les conclusions d'un rapport d'enquête sociale, dont il avait eu connaissance la veille, rendaient "probable" un retrait de l'enfant à sa garde, a souligné Mme Alliot.
Le Procureur a aussi relevé que le père était "parfaitement au courant" d'un drame similaire survenu dix jours plus tôt sur les quais de la Garonne à Bordeaux.
Un chômeur de 30 ans s'était dénoncé auprès de passants, affirmant qu'il venait de jeter son nourrisson de 4 mois et demi dans le fleuve. Le contexte était celui d'une "tension conjugale".
Impossible, pour autant, d'affirmer à ce stade si ce fait divers-là peut avoir influencé le père de la fillette : "l'instruction s'attachera à le démontrer" si c'est le cas, selon le parquet. Mais "on se pose la question", a insisté Mme Alliot
Le père interpellé le 11 novembre avait lui aussi été mis en examen pour homicide volontaire sur mineur de moins de 15 ans et écroué. Le corps de son bébé n'a pas été retrouvé, pas plus que celui de la fillette de 21 mois.
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