Il travaille aux quatre coins du monde et anime chaque année les prestigieuses vitrines des galeries Lafayettes, à Paris. Le marionnettiste Sylvain Ducloux ne tarit pourtant pas d'éloges sur l'exposition de Noël de la ville du Havre. "Il y a un talent répandu de façon uniforme, techniquement, c'est parfait. C'est même impressionnant", commente le professionnel, qui collabore depuis dix ans au conte de Noël havrais. À l'approche de l'ouverture, il y apporte la touche finale, en venant mettre en mouvement les personnages. "Ce sont sept à dix jours de boulot intense, avec des grandes journées de dix à douze heures. Mais cela se passe à merveille, l'expérience joue beaucoup", poursuit le marionnettiste.
Il y a bien un ourson cette année, mais ce sont plutôt les animaux exotiques qui sont à l'honneur.
Car ce qui fait la singularité de cette animation de fin d'année, gratuite pour tous les visiteurs, c'est qu'elle est entièrement imaginée, conçue et fabriquée par les agents municipaux, depuis le début des années 2000. "Une partition de musique", dixit le directeur de l'événementiel, Jérôme Le Bay, dont l'un des secrets réside dans le réemploi des décors d'une année sur l'autre, qui permet d'économiser 30 à 40 000 €.
"Techniquement, c'est parfait. C'est même impressionnant"
"Le point de départ d'une histoire, c'est le tri dans notre stock", confirme le scénographe de la Ville, Raoul Dollat. La gare, l'une des pièces maîtresses cette année, fut autrefois une allée couverte dans un style Eiffel. En quelques coups d'aiguille, un personnage de chien est devenu un lion. "Je chine beaucoup" pour compléter les vitrines, précise aussi Raoul Dollat, qui sollicite également les musées de la ville, des collectionneurs privés ou des associations comme Emmaüs. Pour cette édition, l'Association des modélistes havrais amateurs va relever le défi de faire tourner un petit train pendant 300 heures. Des entreprises sont également mobilisées pour prêter du matériel, comme le spécialiste de la décoration Bouchara ou les jouets Sajou. Mauviel, fleuron normand des casseroles en cuivre, a participé à un conte ces dernières années. La société havraise Publimage a pu être sollicitée pour réaliser des panneaux explicatifs pour les enfants. Quant à l'enregistrement du conte de Noël qui accompagne le livret de l'histoire, vendu 3 €, il est assuré par les élèves du théâtre des Bains Douches.
Les gratte-ciel de Sydney sont impressionnants !
Mobilisé dès le mois de janvier pour imaginer le conte, le scénographe s'attache à travailler un parcours différent chaque année, "pour donner une émotion nouvelle aux visiteurs". L'hôtel de ville du Havre est un terrain de jeu idéal, avec son hall de 1 000 mètres carrés et sa hauteur sous plafond de 14 mètres. "C'est une mairie exceptionnelle en termes architecturaux", souligne lui aussi le marionnettiste Sylvain Ducloux, qui a même profité de l'exposition de Noël pour expérimenter un nouveau procédé, il y a quelques années : synchroniser les mouvements des marionnettes sur de la musique ou des sons. Une technique qu'il réutilise aujourd'hui en spectacle.
Le conte de Noël emmène les enfants en voyage, cette année.
Jérôme Le Bay, directeur de l'événementiel pour la Ville du Havre, revient sur le coût et les heures de travail que représente le conte de Noël.
Combien d'heures de travail représente
le conte de Noël ?
"Le volume horaire n'est pas vraiment quantifiable. Une cinquantaine d'agents sont mobilisés au global : couturière, menuisiers, soudeurs, électriciens, puis les "gilets rouges" pour la sécurité après l'ouverture… Pour certains, ce ne sont que quelques heures, pour une soudure particulière par exemple. Pour notre scénographe, Raoul Dollat, c'est beaucoup plus, au moins 25 % de son activité à l'année."
Il y a un enjeu de transmission
des savoir-faire ?
"Nous faisons appel à des compétences précises et précieuses de nos agents. Ce conte de Noël permet une démonstration des savoir-faire de la collectivité, sans doute moins perceptibles quand un peintre en bâtiment s'occupe des murs ou des passages cloutés. Mario Pitassi, menuisier-décorateur, a pris soin de former des agents avant de prendre sa retraite. C'est ainsi qu'un jeune monteur est devenu électricien sur l'exposition puis a créé toute la mise en lumière de l'expo."
Le coût évoqué de cette exposition
est de 100 000 €…
"C'est dans cet ordre d'idée. Ce qui est certain, c'est que si l'on devait externaliser cette exposition, elle coûterait bien plus cher. La récupération des éléments d'une année à l'autre permet d'économiser 30 à 40 000 € par an. L'entrée est gratuite, mais le pari est d'offrir un moment féerique dans la maison commune qu'est l'hôtel de ville. Avec 100 000 visiteurs, l'idée est aussi de faire venir des gens qui feront leurs emplettes de Noël au Havre."
Cette année, le conte de Noël de la ville du Havre nous fait voyager jusqu'au pays des kangourous.
Pas d'oursons ou de lutins, pour l'édition 2021 du conte de Noël de l'hôtel de ville du Havre. En revanche, on peut y croiser des kangourous boxeurs, un lion, un koala… Les visiteurs sont en effet transportés en Australie ! "On essaie de coller à la programmation culturelle annuelle", explique Raoul Dollat, le scénographe de la Ville, dont les équipes ont travaillé toute l'année autour de l'escale australienne. "D'habitude, on simule du bouleau ou du sapin, cette fois-ci, ce sont des bambous", sourit Jean-Marc Touttain, artiste peintre et illustrateur du conte.
Un bateau de 15 mètres
Ce sont donc Tom et Lucie, deux enfants espiègles, qui guident les Havrais. Leur histoire débute, comme à l'accoutumée, dans les huit vitrines extérieures, et se poursuit dans le forum. Punis par leur tante, qui leur impose de rester en France pour Noël, les minots vont tout imaginer pour se faire passer pour elle et rejoindre en paquebot le pays des aborigènes. Parmi les pièces maîtresses de l'exposition : un train à vapeur et sa gare, et surtout un navire de 15 mètres de long. "Avant de partir à la retraite, notre menuisier Mario Pitassi a réalisé une maquette grandeur nature du bateau, à l'aide de la miniature du France, visible dans les salons de l'hôtel de ville", précise Raoul Dollat. Autre défi technique : les gratte-ciel de Sydney. Ce sont des tissus, tendus depuis la verrière, qui simulent l'impression de hauteur.
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