"Je suis écœuré, dégoûté, je ne reviendrai jamais au métier." Raphaël Wautier, maître d'hôtel à Rouen depuis des années est amer. Le trentenaire faisait partie de ces extras, chef d'équipe, capables d'assurer des services sur des événements dans la région ou en Île-de-France. "Un métier passion", qui a pu être rémunérateur, mais pour lequel il s'est "bousillé la santé". Aujourd'hui, il estime faire partie des grands oubliés de la crise sanitaire. Avec ses dizaines de différents contrats et des démarches pas forcément à jour, il a été exclu des indemnités chômage et s'est retrouvé soudainement au RSA. Il s'apprête désormais à ouvrir sa boutique pour être son propre patron. Et il est loin d'être un cas isolé dans un secteur d'activité difficile, en hôtellerie et en restauration, tous types de contrats confondus.
Un vivier épuisé
"Aujourd'hui, cela va plus vite de citer les établissements qui ne cherchent pas à recruter", explique Sandra Chanson, responsable de l'agence RAS intérim de Sotteville-lès-Rouen, spécialisée dans l'hôtellerie et la restauration. Les annonces se multiplient, pour des cuisiniers et des serveurs notamment, sur toutes les plateformes.
Le problème : personne ne postule. "Aujourd'hui, on a envoyé 60 textos à notre vivier pour un poste de serveur, 17 pour un poste de chef de cuisine, on a eu une seule réponse : négative", déplore-t-elle. Parmi les explications, Sandra Chanson évoque le fait que les personnes n'ont pas attendu la réouverture pour travailler. Beaucoup ont fait le choix de se réorienter, avec parfois de meilleures conditions de travail et des conventions collectives bien plus étoffées que celle du tourisme, qui n'apporte que très peu de garanties. "Les gens ne veulent plus faire des coupures, travailler le week-end, faire des heures supplémentaires qui ne sont pas mieux payées." Un constat que partage totalement Emmanuel Borla, le directeur du nouvel hôtel Radisson Blu de Rouen, au pied du Donjon. "On a perdu beaucoup de candidats potentiels car les gens ont voulu travailler dans d'autres secteurs, être plus libres", reconnaît-il. Côté hébergement et réception, ses équipes sont désormais au complet, mais il admet qu'il "a fallu revoir un peu nos exigences sur certains postes". Côté restauration en revanche, avec une cuisine qui se veut gastronomique, les candidats compétents ne se bousculent pas. Ils ont en plus compris que la demande était forte et "après, c'est la surenchère !" Un bon cuisinier se sait rare désormais et va faire jouer la concurrence. De quoi tirer les salaires vers le haut ? Il est trop tôt pour le dire, d'autant que l'incertitude plane encore sur un secteur qui a été durement touché par la crise sanitaire. Mais Emmanuel Borla se veut optimiste. "Ce sera une belle saison !"
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