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Afghanistan: trois saisons de pavots alimentent le boum de l'opium

Afghanistan: trois saisons de pavots alimentent le boum de l'opium
Un fermier afghan montre des graines de pavot à Lashkar Gah, dans le sud de l'Afghanistan, le 4 octobre 2016 - WAKIL KOHSAR [AFP]

Sa main joue dans sa poche avec une poignée de graines blondes pendant qu'adossé à un arbre, Nematuhllah, paysan du Helmand, explique comment trois récoltes annuelles de pavot améliorent son revenu - avant d'alimenter le conflit afghan.

Une seule récolte au printemps faisait déjà de l'Afghanistan l'un des principaux producteurs d'opium au monde, avec toutes les apparences d'un narco-état, en butte à une insurrection islamiste persistante des talibans, financée en partie par la drogue.

Désormais, Nematullah et les fermiers du Helmand, province du Sud largement sous contrôle taliban, engrangent deux saisons de pavot supplémentaires, en été et en automne. Cela s'explique selon les experts par le climat, l'amélioration des pratiques culturales et sans doute des graines génétiquement modifiées, au moment où les campagnes d'éradication s'effondrent.

"On avait traditionnellement une récolte par an, maintenant on en a trois", affirme Nematullah, jeune agriculteur du district instable de Kajaki, dans le nord de la province. "Le Helmand est tout le temps en guerre, et il n'y pas d'emploi à part rejoindre les talibans. Le pavot est une bénédiction, c'est lui qui nous fait vivre toute l'année".

Nematullah s'est glissé hors de son village, un nid de talibans, pour rencontrer l'AFP dans la capitale provinciale, Lashkar Gah, apportant avec lui quelques minuscules graines ivoire.

Fournies par des marchands locaux, elles réduisent le cycle de croissance du pavot à 70 jours contre cinq à six mois habituellement, avec une qualité d'opium tout à fait comparable, ont assuré à l'AFP quantité de producteurs.

- parrainage taliban -

"Certaines régions du Helmand peuvent produire deux récoltes par an grâce à un climat favorable, mais trois saisons de pavot, ça fait sûrement appel à des graines OGM," estime Jelena Bjelica, chercheuse de l'Afghanistan Analysts Network.

"Ces graines proviendraient de Chine où la production d'opium pour l'industrie pharmaceutique est légale" confie-t-elle à l'AFP. Mais elle précise ignorer qui organise leur distribution en Afghanistan.

Les champs de pavots aux fleurs roses et blanches qui participent au financement de l'insurrection à travers le pays menacent l'existence même de l'Etat afghan.

Les talibans, qui avaient interdit la culture du pavot sous leur régime jusqu'en 2001, s'apparentent aujourd'hui de plus en plus à un cartel de la drogue, selon de nombreuses sources afghanes et occidentales, estimant qu'ils engrangent jusqu'à 1,2 milliard de dollars par an rien qu'en taxes sur les producteurs.

Ces nouvelles récoltes, mettant encore une fois en évidence l'échec de la lutte antidrogue conduite par les Américains à coups de milliards de dollars, risquent de gonfler encore les coffres des insurgés.

Cet argent frais augmente leurs moyens de recruter des combattants au sein d'une population sans emploi - et de corrompre les forces afghanes.

"Quand les soldats aux barrages sont payés autour de 10.000 roupies (soit 87 euros, la monnaie pakistanaise étant la plus usitée dans cette province frontalière, ndlr), l'ennemi peut aligner jusqu'à 50.000 pour les convaincre d'abandonner leur position", confesse à l'AFP un responsable des services de sécurité du Helmand.

"C'est particulièrement inquiétant".

L'opium reste le principal revenu pour beaucoup de paysans afghans qui semblent privilégier les zones sous contrôle taliban pour bénéficier de leur protection - ce qui fait dire à l'ONU que les insurgés agissent plus comme des "parrains" que comme un gouvernement parallèle.

Ces nouvelles récoltes sont signalées dans les districts nord du Helmand aux étés plus frais, comme Nawzad, Musa Qala, Sangin et Kajaki - presque entièrement sous contrôle taliban - et dans certains zones agitées des provinces méridionales de Kandahar, d'Uruzgan et de Zabul.

- 'une mine d'or' -

"Les expérimentations menées par les fermiers les ont conduits jusqu'à trois récoltes annuelles", confirme David Mansfield, auteur d'une enquête sur l'opium en Afghanistan ("A State Built on Sand: How opium undermined Afghanistan").

Il cite "des technologies plus abordables" comme celles pour l'irrigation, grâce aux pompes à énergie solaire: irriguer est indispensable, jusqu'à trois fois par jour pour les deuxième et troisième récoltes, remarque-t-il.

Même ainsi, avec la chaleur "leurs rendements sont moindres," relève M. Mansfield, qui estime que la récolte d'été s'étend sur moins de 10.000 ha et ne s'avance pas pour celle d'automne.

Les paysans interrogés par l'AFP se montrent confiants sur leur capacité à améliorer les rendements à l'avenir, d'autant que l'éradication est au point mort.

Même dans des zones contrôlées par le gouvernement dans le sud, le pavot pousse tranquillement, de crainte de voir les campagnes d'arrachage jeter les fermiers dans les bras des talibans.

L'euphorie s'est emparée du district de Shah Wali Kot, à Kandahar, quand un fermier qui avait planté des oignons dans ses champs après la première récolte d'opium, a vu les graines de pavot résiduelles restées dans le sol refleurir grâce à l'irrigation.

"Ca a fait sensation" rapporte Mohammad Qasim, un planteur de Marjah au coeur du Helmand. "Les gens en parlaient comme s'ils étaient tombés sur une mine d'or!".

Rapidement les paysans ont tenté une deuxième récolte à Marjah, mais il y fait trop chaud l'été. Du coup beaucoup, comme Qasim, ont loué des terres à Shah Wali Kot et Kajaki pour prolonger eux aussi la saison.

Aujourd'hui, plusieurs récoltes par an n'étonnent plus personne, et les fermiers ont cessé les autres cultures qu'ils conservaient par prudence et pour se nourrir.

"L'opium ça rapporte" insiste Qasim. "Pourquoi perdre son temps avec du blé?".

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